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Rhumatologie pour le praticien

16 août 2023

Bernard Mazières, Michel Laroche, Arnaud Constantin, Alain Cantagrel

Rhumatologie pour le praticien

Rhumatologie pour le praticien

Pathologies osseuses : Ostéoporose

Michel Laroche

L'ostéoporose est la plus fréquente des maladies osseuses. Elle génère un handicap important dans la société et son coût est très élevé pour la collectivité.

Définition

L'ostéoporose est une maladie diffuse du squelette qui provoque une diminution de la solidité osseuse augmentant le risque de fracture. Cette fragilité osseuse peut être associée à une diminution de la Densité Minérale Osseuse (DMO) évaluée par ostéodensitométrie, ou DEXA mais pas obligatoirement. La fragilité osseuse résulte donc d'une perte de minéral osseux (déminéralisation) mais aussi de perturbations de l'architecture osseuse (agencement des trabécules osseuses). La sarcopénie due à l'âge contribue aussi au risque de chute et au risque de fracture.

Physiopathologie

L'os est en perpétuel remodelage : celui-ci est assuré par les ostéoblastes formant le tissu ostéoïde qui se minéralise secondairement, grâce au calcium et à la vitamine D, et les ostéoclastes qui résorbent le tissu osseux. Ces phénomènes cellulaires sont régulés par différents systèmes hormonaux (PTH, calcitonine, vitamine D, hormones sexuelles) par l'intermédiaire de cytokines ou de facteurs de croissance (voir chapitre 1, « Remodelage osseux »). Lorsque l'activité des ostéoclastes supplante celle des ostéoblastes, les trabécules osseuses diminuent d'épaisseur et l'ostéoporose se constitue : cette hyperactivité ostéoclastique résulte le plus souvent, chez la femme ménopausée, de la carence oestrogénique, et chez les sujets âgés, quel que soit leur sexe, d'une carence vitamino-calcique, d'une altération de la fonction rénale induisant une hyperparathyroïdie secondaire.

Facteurs de risque

Les fractures ostéoporotiques vont concerner particulièrement les sujets ayant des facteurs de risque d'ostéoporose, dont les principaux sont :

  • l'âge : 80 % des sujets de 90 ans ou plus ont ou auront une fracture ostéoporotique

  • les antécédents de fracture ostéoporotique : les malades ayant eu une fracture vertébrale, symptomatique ou non, ont 20 % de risque supplémentaire d'avoir une nouvelle fracture dans l'année qui suit

  • le sexe : les femmes ont 4 fois plus de risque que les hommes

  • la génétique : une mauvaise acquisition du capital osseux maximal à l'adolescence, génétiquement déterminé pour plus de 70 %, déterminera le risque fracturaire après la ménopause ou au cours du vieillissement

  • des apports calciques réduits à l'adolescence

  • la ménopause précoce

  • la sédentarité

  • l'alcoolo-tabagisme

  • la maigreur (IMC : indice de masse corporelle < 19 kg/m2)

Certaines affections sont épidémiologiquement liées à l'ostéoporose et au risque de fracture : le diabète, les bronchopathies chroniques obstructives et l'insuffisance respiratoire, l'athérosclérose et donc l'insuffisance coronarienne et les accidents vasculaires cérébraux, la dépression, les MICI, les rhumatismes inflammatoires chroniques, les démences, la maladie de Parkinson.

Ostéoporoses secondaires

D'autres maladies provoquent directement une ostéoporose et sont donc des causes d'ostéoporose secondaire, à éliminer lors du bilan initial : l'hypercorticisme endogène ou le plus souvent médicamenteux, l'hyperthyroïdie, l'hyperparathyroïdie, l'ostéomalacie, les malabsorptions, les tubulopathies rénales, l'hémochromatose, la mastocytose.

Épidémiologie [1–3]

Les fractures les plus liées à l'ostéoporose sont les fractures du poignet (moyenne d'âge : 55 ans) (figure 14.1), les tassements ou fractures vertébrales (moyenne d'âge : 70 ans), les fractures du col fémoral (moyenne d'âge : 85 ans) (figure 14.2), mais l'ostéoporose peut favoriser toute fracture – hors fractures du crâne, des doigts et des orteils. Les fractures ostéoporotiques surviennent à la suite d'un traumatisme de faible énergie équivalent au plus à une chute de sa propre hauteur. En France, l'ostéoporose est responsable d'environ 70 000 fractures vertébrales, 60 000 fractures de l'extrémité supérieure du fémur (ESF) et 35 000 fractures du poignet par an. Le coût de ces fractures est d'environ 1 milliard d'euros par an. 20 % des sujets âgés hospitalisés pour fracture de l'ESF décèdent dans les 6 mois suivant la fracture. Les fractures vertébrales, humérales et du bassin s'accompagnent aussi d'un excès de mortalité. Malgré cette gravité et ce coût, seuls 20 % des ostéoporotiques sont actuellement traités en France, pourtant les traitements sont efficaces (70 % de réduction du risque de fracture vertébrale, 40 % de réduction du risque de fracture de l'ESF) et bien tolérés (pas plus d'événements indésirables dans les groupes traitement que dans les groupes placébo lors des études princeps).

Fig14-1

Fig14-1

Fig14-2

Fig14-2

Quels malades traiter ?

Les fracturés Les recommandations récentes appellent à traiter tous les sujets ayant eu une fracture pour chute de sa hauteur ou sans chute (vertèbres, bassin, fémur, humérus, cotes) avec un T score < –1 (ce qui est quasiment le cas pour 90 % des sujets de plus de 60 ans). Encore faut-il que soient effectuées des radiographies du rachis chez les sujets de plus de 60 ans ayant mal au dos ou ayant une perte de taille ! Encore faut-il que les chirurgiens orthopédistes, les rééducateurs, les médecins généralistes soient convaincus que la fracture du col du fémur n'est pas uniquement liée à l'inexorabilité du vieillissement ! Traiter uniquement ces malades avec des médicaments qui diminuent de moitié le risque ultérieur de fracture, réduirait de 30 000 par an, en France, le nombre de fractures ostéoporotiques et éviterait 5 000 décès !

Les malades ayant une ostéoporose densitométrique [4, 5]

L'ostéodensitométrie (DEXA) est, au spécialiste de l'os, ce qu'est le brassard tensionnel au cardiologue. C'est un examen précis, reproductible (1 à 3 %), quasiment non irradiant (40 fois moins qu'un cliché thoracique), peu onéreux (40 euros), qui prédit de façon très performante le risque de fracture ostéoporotique. La diminution de Densité Minérale Osseuse (DMO) est corrélée à 60 ou 70 % au risque de fracture. Alors que la mesure de pression artérielle ou celle du cholestérol ne sont corrélées que de 20 ou 30 % au risque d'infarctus ou d'AVC. Toute diminution de 10 % de la DMO multiplie par deux le risque de fracture. Cet examen devrait être réalisé dès que le problème d'ostéoporose se pose : à la ménopause, chez un homme de la soixantaine avec facteurs de risque, devant une fracture où le traumatisme semble mineur, devant toute pathologie potentiellement associée à l'ostéoporose (voir paragraphe « Physiopathologie »), devant une « transparence » radiologique anormale. Or, son remboursement est contingenté par des règles contestables : antécédents de fracture ostéoporotique, antécédents de fracture de l'ESF chez la mère, ménopause avant 40 ans, corticothérapie ou autre maladie déminéralisante, IMC < 19 kg/ m2 (voir chapitre 1, paragraphe « Ostéodensitométrie »). Il a été démontré que 30 % des femmes ménopausées qui n'avaient pas ces facteurs de remboursement, présentaient tout de même des DMO basses, nécessitant traitement. Les sites à mesurer systématiquement sont le rachis lombaire, le col fémoral et la hanche totale. Le T score compare les DMO du malade à celle d'un sujet de même sexe de DMO maximale. Les valeurs sont exprimées par rapport à la déviation standard (DS) ou écart-type. Tout malade ayant un T score < –3 DS sur un des sites mesurés doit bénéficier d'un traitement anti-ostéoporotique.

Autres malades

Les patients avec des DMO dont le T score est compris entre -2,5 et -3 DS, ou ayant des pathologies vectrices de chutes ou de fragilité osseuse, doivent être adressés au rhumatologue qui évaluera éventuellement le risque fracturaire par le calcul du score FRAX [6].

Que faire avant de débuter le traitement ?

Examen clinique

Cet examen d'un malade ayant un tassement vertébral doit éliminer un cancer pouvant occasionner des métastases osseuses (sein, thyroïde, rein, poumon) et écarter une compression neurologique qui signifierait la probable malignité de ce tassement. La topographie de la douleur rachidienne doit correspondre à la fracture vertébrale objectivée par les radiographies. En cas d'ostéoporose fracturaire ou densitométrique, il doit écarter une ostéoporose secondaire et donc chercher des signes d'hyperthyroïdie, d'hypercorticisme, de malabsorption, de mastocytose (urticaire pigmenté), d'hypercalciurie avec lithiases rénales récidivantes, d'hypogonadisme chez l'homme.

Examens biologiques

Ils ont le même but : éliminer une ostéoporose secondaire. Le bilan comprend : VS, électrophorèse des protides sériques (éliminer un myélome), calcémie, phosphorémie, créatininémie, calciurie, phosphaturie (si la phosphorémie est basse), créatininurie des 24 heures, ou calcul des rapports calciurie/créatininurie sur les urines du matin, TSH, testostéronémie chez l'homme. Les recueils urinaires sont inutiles après 70 ans. Ce bilan est normal dans l'ostéoporose primitive. D'autres dosages pourront être demandés en fonction des signes cliniques d'orientation ou d'anomalies du BPC : bilan ferrique (hémochromatose), anticorps de la maladie coeliaque (malabsorption), tryptase sérique (mastocytose), test au Dectancyl® (hypercorticisme), PTH et vitamine D (anomalies du BPC : ostéomalacie, hyperparathyroidie), chaînes légères sériques (hypogammaglobulinémie). Si l'on doit choisir un traitement per os de l'ostéoporose, le dosage du CTX sérique permettra ensuite de vérifier l'observance de ce traitement.

Examens d'imagerie

Radiographies

Elles permettent d'objectiver les tassements et fractures vertébraux. Elles sont réalisées en cas de douleurs chez tout sujet en âge d'avoir de l'ostéoporose et en cas de diminution de taille de plus de 4 cm par rapport à la taille à 25 ans. Il faut des radiographies de face et de profil, centrées sur la colonne thoracique, sur la charnière thoraco-lombaire et sur la colonne lombaire. Les vertèbres les plus concernées sont T12 et L1, puis T7 à T11 et L2, L3. Viennent ensuite D6, L4 et L5 (figure 14.3). Pour évoquer un tassement vertébral, il faut qu'il existe une diminution de hauteur de la partie moyenne ou antérieure de la vertèbre de plus de 20 % par rapport au mur postérieur : l'aspect de la vertèbre tassée peut être la concavité d'un plateau, un aspect biconcave, un aspect en coin ou en galette (figure 14.4).

Fig14-3

Fig14-3

Fig14-4

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VFA (Vertebral Fracture Assessment)

Les radiographies standard peuvent être avantageusement remplacées par la VFA effectuée lors de la DEXA, mais cet examen n'est – pour l'heure – pas coté.

IRM

En cas de doute clinique (antécédents de cancer du sein, compression neurologique) ou radiographique (mauvaise visualisation d'une corticale, d'une épineuse, d'un pédicule, hétérogénéité de la trame), une IRM permettra de dédouaner un processus tumoral. L'IRM peut aussi avoir un intérêt lorsqu'une vertébroplastie antalgique est discutée. Elle permet d'objectiver l'oedème vertébral (hypersignal en séquence STIR) signant la non-consolidation de la fracture, et donc son implication dans la douleur rachidienne.

Quel traitement ? [7–14]

Les traitements de l'ostéoporose (voir chapitre 52, « les médicaments de l'os ») réduisent d'environ 50 % le risque de fracture. Leur efficacité intervient après 6 à 12 mois de traitement. Leur efficacité et leur innocuité sont démontrées à 5 ou 10 ans (durée des différentes études les concernant). Leurs effets secondaires sont très rares : les ostéonécroses de la mâchoire ne concernent qu'un malade sur 30 000, les fractures atypiques un sur 10 000. Aucune étude contrôlée, randomisée, n'a été effectuée pour comparer leur efficacité respective.

Traitement hormonal

Le Traitement Hormonal de la Ménopause (THM) est indiqué s'il existe des troubles climatériques chez les femmes entre 50 et 60 ans. La durée de sa prescription est fonction de ces troubles, après discussion du rapport bénéfice/risque avec la patiente. S'il existe une fracture, il doit être associé à un bisphosphonate. Le raloxifène est à privilégier si le risque de fracture périphérique est peu élevé : âge inférieur à 65 ans ou absence des facteurs de risque suivants : T score fémoral ≤ –3 DS, risque de chute élevé. Il ne diminue pas le risque de fracture de l'ESF, mais il diminue de moitié le risque de cancers du sein récepteurs hormonaux positifs.

Bisphosphonates

L'alendronate (70 mg) et le risédronate (35 mg) sont des bisphosphonates administrés per os de façon hebdomadaire. Ils sont contre-indiqués en cas de RGO sévère ou de hernie hiatale. Ils ne sont pas absorbés en cas de prise alimentaire associée. Le zolédronate est un bisphosphonate IV (une perfusion lente par an de 5 mg). Il est à privilégier chez des sujets polymédicamentés ou non observants. Il a fait l'objet d'une étude positive chez des sujets âgés hospitalisés pour fracture de l'ESF chez qui il a diminué significativement le risque de fracture ultérieure et la mortalité. Il provoque en revanche une fois sur cinq un syndrome pseudo-grippal durant 3 à 4 jours, à traiter par paracétamol. Il peut majorer une insuffisance rénale préexistante et ne doit pas être prescrit lorsque le DFG est < 40 mL/min.

Dénosumab

Il est remboursé, en France, pour des raisons incompréhensibles et non « scientifiques », après prescription de bisphosphonates, quelle que soit la raison du switch. Il s'administre sous forme d'injections sous-cutanées (60 mg) tous les 6 mois. Il induit un gain densitométrique plus important et plus prolongé que les bisphosphonates. En revanche, il n'a aucune rémanence, et les malades perdent en 6 mois, à la hanche, le gain de DMO obtenu en 8 ans. Un risque de fracture a été rapporté chez les sujets à haut risque à l'arrêt du traitement. Ce traitement ne doit donc pas être stoppé ou, s'il doit l'être, il doit être relayé par un bisphosphonate pendant quelques mois.

Tériparatide

Il est le seul traitement anabolique actuellement disponible. Son remboursement est limité pendant 18 mois aux malades ayant au moins deux fractures vertébrales. Il est administré par voie sous-cutanée (20 μg), tous les jours. Il est densitométriquement plus actif chez les patients qui n'ont pas été traités antérieurement par bisphosphonates. Lui non plus n'est pas rémanent, et un bisphosphonate doit lui succéder à l'arrêt ou, « hors la loi ou hors remboursement », le dénosumab.

Calcium et vitamine D

Pris isolément, ils n'ont d'intérêt démontré que chez des femmes de plus de 80 ans en institution. Ils doivent être associés aux vrais traitements de l'ostéoporose chez des malades qui « en manquent ». Pour le calcium, des apports de 1 g par jour semblent suffisants. Il faut privilégier le calcium alimentaire : 3 laitages par jour ou 2 laitages et 3 verres d'eau riche en calcium. Sinon, il faut adapter les calciums du commerce aux goûts des malades (à sucer, effervescent, sachets à dissoudre). Pour la vitamine D, l'interrogatoire sur l'ensoleillement suffit à éliminer les carences sévères : chez les malades relativement jeunes, marchant à la belle saison en jupe, short ou bras de chemise, 100 000 UI de vitamine D3 tous les 2 mois, d'octobre à mai, doivent être administrés : peu importe que le taux ainsi obtenu soit de 23, 29 ou 35 ng/mL ! Pour les sujets plus âgés, ou les sujets ne s'exposant pas au soleil, ce même traitement doit être donné toute l'année après une dose de charge de 3 ampoules, à 15 jours d'intervalle.

Maintien d'une activité physique, prévention des chutes [15]

Le sujet ostéoporotique peut tout faire sauf du parapente, du motocross ou du ski sur les pistes verglacées ! Il conservera ainsi sa trophicité musculaire et améliorera son architecture osseuse. Le risque de chute peut être évalué aisément par le Times up and go ou l'appui unipodal. La prévention des chutes repose sur des mesures médicales (vue, pied, somnifères, hypotenseurs), d'ergothérapie (baignoires, tapis, lever la nuit à l'aveugle) et de renforcement musculaire.

Quel suivi ?

Suivi clinique

Il comporte le recueil des évènements fracturaires, la recherche de nouveaux facteurs de risque et/ou maladies inductrices d'ostéoporose, l'évaluation du risque de chutes (chutes récentes, facteurs de risque de chutes), la tolérance et l'observance des traitements. Une consultation tous les 6 mois est conseillée. Pour le raloxifène ou les bisphosphonates per os, un dosage du CTX sérique, qui doit avoir baissé de 50 % au moins, peut permettre de confirmer l'observance au traitement. Il n'est pas utile de réitérer ce dosage.

Radiographies

De nouvelles radiographies ne seront réalisées qu'en cas de perte de taille > 1,5 cm.

Nouvelle DEXA

Après deux ans de traitement ou en fin de séquence thérapeutique, une nouvelle DEXA permettra de s'assurer que le gain de DMO correspond au gain attendu. Il faut que ce nouvel examen soit réalisé sur le même appareil, ou au minimum sur un appareil de même marque et que les zones de mesure soient rigoureusement identiques à celles du premier examen. En cas de perte osseuse, un avis spécialisé doit être pris (non-observance, mauvaise absorption, ostéomalacie associée, erreur de diagnostic au départ (HPT normocalcémique, malabsorption, mastocytose ?).

Quelle durée des traitements ?

Le point doit être fait après 3 (zolédronate) ou 5 ans (alendronate, risédronate) de traitement : point clinique, biologique (CTX) et densitométrique. Le traitement doit être poursuivi en cas de T score < –2,5 DS sur un site, de fracture récente, de nouveaux facteurs de risque de chute ou de fracture (comorbidité apparue). Si le CTX est très bas, les perfusions de zolédronate peuvent être effectuées uniquement un an sur deux. Comme dit précédemment, le dénosumab ne doit pas être arrêté. Chez des femmes relativement jeunes, si ce traitement a permis un gain substantiel de DMO avec quasi normalisation de celle-ci, il doit être relayé, sur quelques mois, par un bisphosphonate.

Traitement des douleurs de la fracture-tassement vertébrale récente

Le repos au lit (10 à 15 jours), puis un corset au lever pour les tassements lombaires, viendront à bout des douleurs post-fracturaires. On peut proposer sur le plan antalgique soit des injections de calcitonines (100 UI de calcitonine salmine pendant 10 jours, puis une fois par jour pendant 10 jours). Les AINS n'ont aucun intérêt. Les antalgiques de palier 2 sont prescrits si besoin. Le repos strict permet le plus souvent d'éviter les morphiniques. Une HBPM permet la prévention des phlébites durant l'alitement. En cas de douleurs persistant plus d'un mois, plus tôt chez les sujets très âgés ou les déments, une vertébroplastie [18] peut être discutée (figure 14.5).

Fig14-5

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Ostéoporose masculine [16]

L'ostéoporose masculine n'est pas rare : elle touche environ 7 à 8 % des sujets mâles. Les facteurs de risque, les signes cliniques et radiologiques, sont les mêmes que chez la femme, mais du fait de l'absence de véritable andropause, les ostéoporoses secondaires sont fréquentes (50 % des cas) et une enquête étiologique exhaustive est indispensable.

Examen clinique

L'examen clinique recherche :

  • des signes d'hypogonadisme : baisse de la libido, diminution de pilosité, gynécomastie, atrophie des organes génitaux externes ;

  • des signes d'hypercorticisme iatrogène (interrogatoire) ou endogène (HTA, répartition facio-tronculaire des graisses, vergetures, etc.) ;

  • des signes d'hyperthyroïdie ;

  • des signes de maladies rares déminéralisantes : ostéogénèse imparfaite (maladie de Lobstein : fractures corticales à l'adolescence, sclérotiques bleues, surdité, antécédents familiaux), mastocytose (urticaire pigmentée), maladie de Marfan, lithiases rénales calciques récidivantes par hypercalciurie.

Bilan biologique

Il comprend (en plus du bilan effectué devant une ostéoporose féminine) :

  • un dosage de la testostéronémie,

  • un bilan phosphocalcique urinaire des 24 heures pour dépister une tubulopathie (diabète phosphoré ou hypercalciurie),

  • un bilan ferrique : fer, ferritinémie (hémochromatose).

Traitements de l'ostéoporose masculine

Ils sont identiques à ceux de l'ostéoporose post-ménopausique, raloxifène et dénosumab mis à part.

Ostéoporose cortico-induite (OPCI) [17]

Les corticoïdes induisent une ostéoporose par plusieurs mécanismes :

■ dépression des ostéoblastes, ■ stimulation des ostéoclastes, ■ diminution de l'absorption calcique, ■ baisse des hormones sexuelles par freination de l'axe hypothalamo-hypophysaire. Ils favorisent les fractures par augmentation du risque de chute secondaire à l'atteinte musculaire. Les fractures peuvent être graves chez des patients fragilisés par la maladie qui a justifié la prescription de cortisone : un asthmatique peut aggraver son insuffisance respiratoire si des fractures de côtes l'empêchent de tousser, une polyarthritique peut être rendue grabataire par une fracture du col. L'importance de l'ostéoporose cortisonique dépend : de la dose de corticoïdes, de la voie d'administration, et du malade (ménopause, carence calcique associée). La perte osseuse sous corticoïdes est rapide, et apparaît sur l'ostéodensitométrie, dès le 6e mois.

Examens

On admet que les corticoïdes ont pratiquement toujours un effet délétère sur l'os lorsqu'ils sont prescrits à plus de 7,5 mg d'équivalent prednisone pendant plus de 3 mois. Dans ce cas, il faudra donc :

  • évaluer les autres facteurs de risque d'ostéoporose et les corriger si possible : prescription d'un THS, en l'absence de contre-indications ;

  • effectuer un bilan phosphocalcique, un dosage de THS, de testostérone chez l'homme ;

  • quantifier l'ostéoporose par DEXA.

Traitement

  • Chez des sujets de moins de 50 ans ou des femmes non ménopausées, lorsque le T score > –1,5 DS, un simple suivi DEXA à un an peut être proposé.

  • Les malades de plus de 50 ans et les femmes ménopausées doivent tous être traités. Les traitements remboursés dans cette indication sont : l'alendronate, le risédronate, le zolédronate, le tériparatide si plus de deux fractures vertébrales. Compte tenu de la physiopathologie de l'OPCI, calcium et vitamine D doivent être systématiquement associés.

Références

En savoir plus

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© 2018, Elsevier Masson SAS.

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L'auteur de ce chapitre

Michel Laroche Professeur des universités, université Toulouse III-Paul Sabatier. Praticien hospitalier. Rhumatologue. Centre de rhumatologie et d'immunologie Clinique, hôpital Pierre- Paul Riquet, CHU de Toulouse.

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