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Bien débuter - Réanimation-Soins intensifs

29 décembre 2021

Par Monique Remillieux

Bien débuter - Réanimation-Soins intensifs

Bien débuter - Réanimation-Soins intensifs

Cas clinique 2 :  Prise en charge d’un patient atteint de la Covid-19 en réanimation

  • Présentation du cas clinique

  • Fiche 14 Comprendre la Covid-19

  • Fiche 15 Le SDRA

  • Fiche 16 Comprendre le traitement de la Covid-19

  • Fiche 17 Règles de protection face à la Covid-19

  • Fiche 18 L’oxygénation par membrane extracorporelle dans la Covid-19

Présentation du cas clinique

Situation abordant les sujets suivants

  • Covid-19

  • Protection et isolement

  • Pneumopathie acquise

  • SDRA

  • Decubitus ventral

Vous êtes infirmière dans le service de réanimation médicale, vous devez prendre en charge M. Albert, 89 ans, pour détresse respiratoire dans un contexte d'infection pulmonaire virale (Covid-19).

Dossier patient

Antécédents médicaux et chirurgicaux

M. Albert a été opéré de la vésicule biliaire en 1993. Il présente un indice de masse corporelle (IMC) à 28. Il est hypertendu non traité.

Traitement habituel

M. Albert ne prend pas ses traitements antihypertenseurs.

Habitus et mode de vie

M. Albert est autonome, il fait ses courses, il vit seul, n'a pas d'enfants. Il marche 30 minutes par jour.

Histoire de la maladie

Il a présenté une toux avec fièvre il y a 1 semaine. Aujourd'hui, sa température est à 38,5° C, sa fréquence cardiaque à 120 battements par minute, une fréquence respiratoire à 20 mouvements par minute, une saturation en air ambiant (FiO2 : 21 %) à 88 %. Le patient présente des signes de détresse respiratoire, une cyanose, des sueurs abondantes.

Fiche 14 : Comprendre la Covid-19

1. Définition

  • Le SARS-CoV-2 (acronyme anglais deSevere Acute Respiratory Syndrome Coronavirus 2) est un virus à acide ribonucléique (ARN) (un bêta-coronavirus) qui possède de nombreux variants mutants (anglais, sud-africain, brésilien...).

  • Le mode de transmission du virus s'effectue par :

    • des gouttelettes et sécrétions respiratoires expulsées lors de la parole, la toux et les éternuements ;

    • la transmission manuportée par le contact avec une surface infectée, les mains, les selles.

  • L'incubation dure entre quatre et cinq jours.

2. Clinique

Covid-19 et réponse inflammatoire

La Covid-19 associe :

  • une réponse inflammatoire intense ;

  • un orage cytokinique ;

  • une activation de la coagulopathie liée à des mécanismes de thrombo-inflammation.

Comme M. Albert, les patients présentent souvent des facteurs de risque thrombotiques : âge élevé, obésité, mobilisation réduite favorisant les embolies et la décompensation respiratoire.

Pneumopathie et Covid-19

C'est la manifestation clinique la plus fréquente, le patient présente : une fièvre, une toux, une dyspnée et des infiltrats bilatéraux à l'imagerie thoracique.

Il n'y a pas de caractéristiques cliniques spécifiques permettant de distinguer de manière fiable la Covid-19 des autres infections respiratoires virales. La dyspnée apparaît après une médiane de cinq jours d'évolution. Il est à noter :

  • l'hypoxémie d'apparition progressive évoluant sur plusieurs jours ;

  • la toux sèche ou peu productive sans expectorations avec une dyspnée majorée à l'effort ;

  • des douleurs thoraciques diffuses peuvent limiter la toux ;

  • la tachypnée est superficielle sans tirage intercostal, ni balancement thoraco-abdominal ;

  • l'auscultation retrouve des crépitants fins ;

  • la cyanose est rare malgré la profondeur de l'hypoxémie ;

  • la fièvre est très fréquente, mais son absence ne suffit pas pour éliminer le diagnostic ;

  • les arythmies ventriculaires résultent de plusieurs mécanismes comme des lésions myocardiques, mais peuvent aussi être secondaires à l'allongement du QT ;

  • l'allongement du QT s'explique par un effet direct sur les canaux potassiques et calciques, mais aussi par le biais de l'activation du système sympathique et par une modification du métabolisme ;

  • les atteintes cardiovasculaires et les défaillances multiviscérales constatées dans les infections graves semblent sans lien apparent avec la pneumopathie initiale.

  • la COVID serait responsable d'une inflammation vasculaire systémique provoquant les atteintes vasculaires, myocardiques, cérébrales, pulmonaires, rénales ou digestives.

Points clés : Covid-19 et SDRA

  • Les patients atteints de pneumonie Covid-19 répondent à la définition européenne du SDRA (voir fiche 15). Ils présentent une forme atypique de ce syndrome : la compliance pulmonaire est relativement bien préservée alors que l'hypoxémie est d'une intensité supérieure aux autres SDRA

Dans le cas clinique, M. Albert présente une fièvre, une tachycardie (120 battements par minute [BPM]) et une saturation à 88 % avec une FiO2 en air ambiant (21 %). La fréquence respiratoire est à 20 par minute, des signes de détresse respiratoire sont présents, ainsi qu'une cyanose et des sueurs abondantes.

Points clés : Covid-19 et facteurs de comorbidités

Les comorbidités sont des conditions cliniques ou thérapeutiques favorisant l'évolution péjorative de l'infection :

  • personnes âgées de 65 ans et plus (même si les personnes âgées de 50 ans à 65 ans doivent être surveillées de façon plus rapprochée) ;

  • pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d'une infection virale (broncho-pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d'apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;

  • antécédents cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (complications cardiaques, rénales et vasculocérébrales), antécédents d'accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade New York Heart Association (NYHA) III ou IV ;

  • diabète chronique non équilibré ou avec complications ;

  • insuffisance rénale chronique dialysée ;

  • cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;

  • cirrhose ≥ stade B ;

  • immunodépression :

    • médicamenteuse : chimiothérapie anticancéreuse, immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive,

    • infection à virus de l'immunodéficience humaine (VIH) non contrôlée ou avec des Congenital Dyserythropoietic Anemia (CDA) < 200/mm3,

    • greffe d'organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques,

    • hémopathie maligne en cours de traitement ;

  • obésité IMC > 30 ;

  • syndrome drépanocytaire majeur en raison d'un risque accru de surinfection bactérienne ou de syndrome thoracique aigu ou ayant un antécédent de splénectomie ;

  • grossesse à partir du troisième trimestre.

Dans le cas clinique, M. Albert cumule de nombreux facteurs de comorbidités : obésité, HTA non équilibrée, âge.

3. Examen biologique

Test diagnostic de la maladie :

  • le test Reverse Transcription-Polymerase Chain Reaction (RT-PCR) détecte la présence de matériel génétique viral chez le patient, ce qui permet de savoir si le virus est toujours présent

  • les tests diagnostiques antigéniques ou salivaires sont disponibles et facilement réalisables

  • les tests sérologiques ne sont pas utiles pour le diagnostic de l'infection. La plupart des personnes atteintes du SARS-CoV-2 ne commencent à produire des anticorps que onze à douze jours après l'apparition des symptômes. La durée de l'immunité précise n'est pas connue.

4. Particularité des signes paracliniques dans la forme sévère de la maladie Covid-19

La diminution de la saturation pulsée en oxygène (SpO2< 95 %) au repos est majorée par le moindre effort. Cela contraste avec la faible augmentation de la fréquence respiratoire, qui est un signe évocateur de la Covid-19.

La gazométrie artérielle

On retrouve :

  • une hypoxémie (PaO2< 80-100 mmHg) de profondeur variable et discordante par rapport à l'augmentation de la fréquence respiratoire ;

  • une baisse de la saturation artérielle en oxygène (saturation en O2[SaO2] < 95 %) ;

  • une hypocapnie (PaCO2< 35-40 mmHg) peu profonde dans les formes non sévères d'emblée et associée à une alcalose (potentiel hydrogène [pH] > 7,40) respiratoire secondaire à l'hyperventilation alvéolaire ;

  • la lactatémie est en général normale dans les formes avec monodéfaillance respiratoire.

Dans le cas clinique, la réalisation d'une gazométrie en urgence pour M. Albert sera impérative et sa pratique est décrite dans la conduite IDE ci-dessous.

Conduite infirmière

Réaliser un prélèvement artériel

Objectif du soin

  • Cet examen est réalisé dans un but diagnostique, pronostique ou thérapeutique ;

  • il est indiqué devant toute détresse respiratoire aiguë ou désordre métabolique (acte médical qui peut être délégué sur prescription).

Matériel

  • Seringue à gaz du sang ;

  • compresses et antiseptique ;

  • gants ;

  • étiquettes (identification du patient), pochette de transport, bon d'analyse de laboratoire.

Technique

  • Le site de ponction est le plus souvent localisé au niveau de l'artère radiale qui est superficielle, facilement accessible et relativement éloignée du réseau veineux. Pour cette artère, il est conseillé de ne pas utiliser la main dominante. En cas de thrombose majeure du réseau artériel, il existe un risque de compromettre l'usage de la main ;

  • en cas de ponction de l'artère radiale : le patient est installé confortablement en position assise ou allongée et le poignet est maintenu en hyperextension (paume de la main tournée vers l'avant, poignet posé sur un coussin). Le repérage de l'artère radiale se fait comme pour une prise de pouls ;

  • se laver les mains (lavage simple) ;

  • désinfecter largement la zone de ponction avec un produit iodé (sauf contre-indication ou allergie) ;

  • installer stérilement le matériel de ponction sur le champ stérile ;

  • procéder au lavage antiseptique des mains ;

  • mettre les gants stériles et repérer la position de l'artère ;

  • immobiliser l'artère entre deux doigts de la main ne servant pas à la ponction et maintenir fermement cette immobilisation ;

  • introduire l'aiguille en position entre 40° et 45° par rapport à la surface de la peau ;

  • l'aiguille, une fois introduite, ne doit pas être changée d'axe et sera enfoncée doucement jusqu'à l'apparition d'un jet artériel dans la seringue. Sous l'effet de la pression artérielle, le corps de pompe se remplit seul, sans avoir besoin de tirer le piston ;

  • une fois la seringue remplie, la retirer, appliquer immédiatement une compresse et comprimer pendant cinq à dix minutes pour éviter la formation d'un hématome ;

  • éliminer les déchets et se laver les mains (lavage simple) ;

  • si le patient est conscient, lui indiquer l'importance de signaler l'apparition de tous signes anormaux tels que douleur, hématome, sensation de paralysie, etc. ;

  • acheminer rapidement la seringue étiquetée au nom du patient ainsi que la demande d'examen dûment remplie ;

  • noter le soin dans le dossier et récupérer les résultats de l'examen dès que possible.

Analyse des gaz du sang
  • Le pH indique l'équilibre acidobasique du sang en mesurant la concentration d'ions hydrogène (H+).

  • La PaO2 ou pression partielle en dioxygène qui reflète la quantité d'O2 transportée par le sang jusqu'aux organes.

  • La PaCO2 ou pression partielle en dioxyde de carbone qui reflète la quantité résiduelle de CO2 dans le sang artériel après élimination de l'excès de celui-ci au niveau pulmonaire.

  • Les bicarbonates (HCO3-) qui participent à maintenir l'équilibre acidobasique sont excrétés et réabsorbés par les reins en réponse à un déséquilibre du pH. Ce dernier et les bicarbonates sont directement liés.

  • La SaO2 ou saturation en oxygène qui permet d'évaluer la quantité d'O2 fixée sur l'hémoglobine. Cet oxygène transporté va permettre de nourrir les cellules de l'organisme.

Valeurs normales
  • pH : 7,35-7,45.

  • PaO2 : 73-100 mmHg, valeur tenant compte de l'âge du patient.

  • PaCO2 : 35-45 mmHg.

  • HCO3- : 22-28 mmol/L.

  • SaO2 : 95-100 %.

Bien que les gaz du sang n'indiquent pas au médecin la cause directe du déséquilibre, ils vont orienter soit vers un problème respiratoire, soit vers un problème métabolique.

Dans le cas clinique de M. Albert, on parlera d'acidose respiratoire. La clinique doit faire évoquer ces acidoses respiratoires : il est en dyspnée, en sueurs et désature.

Autres examens

Le scanner thoracique est l'examen diagnostique le plus sensible et montre des opacités périphériques multifocales en verre dépoli, un épaississement des septa interlobulaires, des bronchiectasies, une pleurite.

Des anomalies vasculaires précoces sont également identifiées avec le scanner : des signes d'épaississement vasculaire, d'élargissement vasculaire, de congestion vasculaire, mais aussi des signes d'embolie pulmonaire localisés dans les petites branches lobaires.

L'embolie pulmonaire est retrouvée avec un taux plus élevé que celui observé habituellement chez les patients sous ventilation mécanique en réanimation. Un seuil élevé des D-dimères à 2 660 μg/L permet de détecter l'ensemble des patients.

Fiche 15: Le SDRA

Le SDRA peut être :

  • primitif : lié à des agressions pulmonaires directes touchant directement les poumons ;

  • secondaire : lié à des agressions pulmonaires indirectes : choc septique d'origine non pulmonaire, polytraumatisme, transfusion sanguine massive (Transfusion-Related Acute Lunge Injury[TRALI]) ;

  • les facteurs de comorbidités sont importants dans la Covid-19, majorant le risque de survenue d'un SDRA.

Dans le cas clinique, M. Albert risque fortement de se retrouver en SDRA au regard des facteurs de comorbidités.

1. SDRA : définition clinique

Le SDRA se définit par :

  • la présence de signes dans les sept jours suivant une pathologie pulmonaire ou extrapulmonaire aiguë ;

  • l'association d'une hypoxémie aiguë (PaO2/FiO2≤ 300 mmHg) chez un patient ventilé avec une PEP de 5 cmH2O au moins ;

  • la présence d'infiltrats radiologiques bilatéraux non entièrement expliqués par une insuffisance cardiaque ou une surcharge volémique ;

  • une inflammation aiguë et diffuse du poumon ;

  • une hypoxémie artérielle associée à une insuffisance ventilatoire consécutive à une maladie sous-jacente pulmonaire ou extrapulmonaire ;

  • des lésions de l'épithélium alvéolaire et de l'endothélium capillaire.

2. SDRA : gravité

La gravité du SDRA est fonction du rapport PaO2/FiO2 :

  • PaO2/FiO2 de 200 à 300 mmHg : SDRA simple ;

  • PaO2/FiO2 de 100 à 200 mmHg : SDRA modéré ;

  • PaO2/FiO2≤ 100 mmHg : SDRA sévère.

C'est une complication grave mettant en jeu le pronostic vital. Le SDRA est une agression entraînant la mise en jeu des systèmes de défense (la réponse inflammatoire) qui vont dépasser leur but au niveau pulmonaire et continuer à évoluer pour leur propre compte, même si l'agression causale a disparu.

3. Principes de prise en charge du SDRA

  • Assurer une ventilation mécanique protectrice en évitant les barotraumatismes sur la base de 5 à 7 mL/kg de ventilation minute, calculée en fonction du poids idéal théorique.

  • Avoir un objectif d'oxygénation modeste : PaO2 55-80 mmHg ou à défaut SpO2 88-95 %.

  • Monitorer les pressions de plateau (< 30 cmH2O).

  • Pour un SDRA avec un rapport PaO2/FiO2≤ 150 : le patient sera curarisé pendant les 48 premières heures et sédaté profondément.

  • Le décubitus ventral (DV) sera préconisé sur des séances quotidiennes de 16 heures.

Vous venez de lire les fiches 15 et 16.Bien débuter – Réanimation – Soins intensifs © 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Auteurs

  • David Naudin - Cadre supérieur infi rmier anesthésiste, adjoint au directeur de l’institut de formation des cadres de santé de l’AP-HP, coordonnateur du pôle de la recherche paramédicale en pédagogie du CFDC, PhD en sciences de l’éducation, chercheur associé au Laboratoire éducations et pratiques en santé (LEPS ER 3412), université Paris-Sorbonne-Nord.

  • Laurent Brocker - Ingénieur en e-pédagogie, cadre infi rmier anesthésiste, pôle numérique de la formation innovation digitale, CFDC, AP-HP, Paris.

  • Christophe Flageul - Cadre supérieur de santé, responsable pédagogique, CFC : MPPPH, CFDC, AP-HP, Paris.