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Le syndrome de Noonan

France | 3 février 2023

Par Anne-Claire N.

Perfectionnement en Pédiatrie

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Le syndrome de Noonan

Noonan syndrome

T. Edouard Unité d’endocrinologie, maladies osseuses et génétique, hôpital des enfants, CHU de Toulouse, 330, avenue de Grande-Bretagne TSA 70034, 31059 Toulouse cedex 9, France

Résumé

Le syndrome de Noonan (SN) est une maladie génétique rare (1/2000–2500 naissances) caractérisée par l’association de signes faciaux évocateurs, d’anomalies cardiaques (sténose des valves pulmonaires et/ou cardiomyopathie hypertrophique), d’un retard de taille, d’anomalies squelettiques (pectus , scoliose), d’un retard variable de développement et des apprentissages, et d’une prédisposition à certaines tumeurs. Le diagnostic est principalement clinique mais doit toujours être confirmé sur le plan génétique (anomalie identifiée chez plus de 80 % des patients). Le SN est génétiquement hétérogène et causé par des mutations de gènes codant des constituants ou des régulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/mitogen-activated protein kinases (MAPK). Le rôle des pédiatres et des médecins de l’enfant est très important pour évoquer ce diagnostic le plus tôt possible, afin de permettre une prise en charge précoce. La prise en charge est multidisciplinaire et doit être assurée tout au long de la vie, y compris à l’âge adulte. Le devenir à l’âge adulte est moins bien connu et des études prospectives sont nécessaires. Actuellement (en 2021), le traitement des différentes atteintes est symptomatique mais de nouveaux traitements sont en cours d’évaluation (modulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/MAPK).

Summary

Noonan syndrome (NS) is a rare genetic disorder (1/2000–2500 live births) characterized by distinctive facial features, heart defects (e.g., pulmonary valve stenosis, hypertrophic cardiomyopathy), short stature, skeletal abnormalities (e.g., pectus, scoliosis), variable developmental delay, and predisposition to tumors. The diagnosis of NS is mainly clinical but must always be confirmed by genetic testing. This syndrome is genetically heterogeneous and caused by germline mutations in genes encoding components or regulators of the RAS/mitogen-activated protein kinases (MAPK) signaling pathway. The role of pediatricians is essential in suspecting the diagnosis as soon as possible in order to establish early care. Patients with NS require multidisciplinary and life-long management. The evolution of NS in adulthood is poorly known and requires further prospective studies. Currently, there is only symptomatic management of the different features of NS, but new specific treatments (RAS/MAPK modulators) are under investigation.

Mots clés : Syndrome de Noonan, RASopathies, Voie de signalisation RAS/MAPK, Retard de croissance, Sténose des valves pulmonaires, Cardiomyopathie hypertrophique, Prédisposition tumorale

Keywords : Noonan syndrome, RASopathies, RAS/MAPK signaling pathway, Short stature, Pulmonary valve stenosis, Hypertrophic cardiomyopathy, Tumor predisposition

Introduction

Décrit pour la première fois il y a presque 50 ans par une cardiologue pédiatre, Jacqueline Noonan, le syndrome de Noonan (SN) est aujourd’hui bien connu [1]. Il s’agit d’une maladie génétique autosomique dominante dont l’incidence est estimée entre 1/2000 à 1/2500 naissances. Ce syndrome est caractérisé par l’association de signes faciaux évocateurs, d’anomalies cardiaques (sténose des valves pulmonaires et/ou cardiomyopathie hypertrophique), d’un retard de taille, d’anomalies squelettiques (pectus , scoliose), d’un retard variable de développement et des apprentissages, et d’une prédisposition à certaines tumeurs.

Les caractéristiques cliniques du SN sont partagées à des degrés variables par d’autres syndromes phénotypiquement très proches : SN avec lentigines multiples (anciennement syndrome LEOPARD), SN avec cheveux anagènes caducs, syndrome cardio-facio-cutané, syndrome de Costello, neurofibromatose de type 1 et syndrome de Légius. Le SN et les syndromes apparentés sont causés par des mutations de gènes codant des constituants ou des régulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/mitogen-activated protein kinases (MAPK) qui joue un rôle majeur dans de nombreux processus cellulaires comme la prolifération, la différenciation et la survie [2]. Ce groupe de maladie est maintenant dénommé RASopathies et constitue un des groupes d’anomalie du développement les plus fréquents.

La connaissance des bases moléculaires du SN a permis de mieux comprendre la physiopathologie des différentes atteintes et d’imaginer de nouvelles perspectives thérapeutiques.

Principales atteintes et diagnostic clinique

Le diagnostic de SN est principalement clinique et peut-être évoqué aux différentes périodes de la vie : chez le fœtus (devant des anomalies lymphatiques), le nourrisson (devant une cardiopathie, des difficultés alimentaires et/ou une insuffisance pondérale), l’enfant ou l’adolescent (du fait d’un retard statural et/ou pubertaire) et parfois l’adulte. La pénétrance de cette maladie est complète mais il existe une grande variabilité d’expression entre individus, y compris au sein d’une même famille. Plusieurs systèmes de scores basés sur les caractéristiques phénotypiques ont été développés pour aider au diagnostic. Le plus connu est celui de van der Burgt qui prend en compte les principaux signes de la maladie (Tableau I) [3].

Signes anténataux

Le diagnostic de SN peut parfois être suspecté dès la période fœtale devant l’association de signes évocateurs incluant polyhydramnios, anomalies lymphatiques, malformations cardiaques et/ou rénales [4, 5]. L’excès de liquide amniotique ou polyhydramnios, retrouvé chez la moitié des fœtus, pourrait être secondaire à un défaut de déglutition du fœtus. Les anomalies lymphatiques, également présentes chez la moitié des fœtus, sont principalement localisées au niveau de la nuque (augmentation de la clarté nucale puis nuque épaisse ou hygroma kystique) mais peuvent être associées à d’autres anomalies lymphatiques plus sévères (distension des sacs lymphatiques jugulaires latéraux, épanchements pleuraux, péricardique et/ou ascite constituant alors un hydrops foetalis ). Ces anomalies lymphatiques ne sont pas spécifiques du SN et sont fréquemment retrouvées dans les aneuploïdies (notamment syndrome de Turner et trisomie 21). Lorsqu’une recherche génétique de SN est réalisée systématiquement chez les fœtus présentant une augmentation de la clarté nucale associée à un caryotype normal, des mutations sont retrouvées chez environ 10 % des cas. Ces anomalies lymphatiques qui interfèrent avec la migration tissulaire au cours du développement embryonnaire sont probablement responsables des signes faciaux observés en anté- et post-natal. Des anomalies cardiaques (sténose des valves pulmonaires et/ou cardiomyopathie hypertrophique) sont retrouvées chez 10–40 % des fœtus ce qui contraste avec la fréquence des cardiopathies observées à la naissance qui est beaucoup plus importante (environ 80 %). Cette discordance pourrait être expliquée par les limitations de l’échographie fœtale pour ce type de cardiopathies mais surtout par le développement tardif de ces anomalies en fin de grossesse et même après la naissance.

Signes faciaux

Les signes faciaux les plus évocateurs sont localisés au niveau des yeux, des oreilles et de la nuque. On retrouve habituellement un hypertélorisme, un ptosis, des fentes palpébrales orientées en bas et en dehors, un philtrum marqué, des oreilles basses implantées en rotation postérieure avec un hélix épais, un cou court et large (avec au maximum un pterygium coli ) avec un excès de peau et une implantation basse des cheveux. Ces signes sont très variables d’un patient à l’autre, y compris au sein d’une même famille. De plus, le phénotype évolue avec l’âge et peut être discret à l’âge adulte (Figure 1) [6].

Fig 1

Fig 1

Anomalies cardiaques

Les manifestations cardiaques sont très fréquentes (environ 80 %), constituées principalement par une sténose des valves pulmonaires (50–60 %) et/ou une cardiomyopathie hypertrophique (20 %) [7]. La sténose des valves pulmonaires, associée à des valves dysplasiques, est souvent présente à la naissance et s’améliore habituellement avec l’âge ; cependant, une intervention (cathétérisme ou chirurgie cardiaque) est nécessaire chez environ un tiers des patients. La cardiomyopathie hypertrophique peut également être présente chez le nouveau-né mais aussi se développer tout au long de l’enfance ; elle peut être modérée ou sévère (avec 25 % de décès dans la première année de vie).

D’autres anomalies peuvent être retrouvées moins fréquemment : communication inter-auriculaire (CIA, 10 %) ou inter-ventriculaire (CIV, 5 %), persistance du canal artériel (3 %) et plus rarement canal atrio-ventriculaire, sténose ou coarctation aortique, anomalies de la valve mitrale, dilatation des artères coronaires.

Enfin, des anomalies de l’électrocardiogramme sont fréquentes avec des complexes QRS larges ainsi qu’une négativation dans les dérivations précordiales gauches, une déviation gauche de l’axe et des ondes Q géantes.

Croissance staturo-pondérale, puberté et autres atteintes endocriniennes

Les anomalies de la croissance, de la puberté et les atteintes endocriniennes sont très fréquentes dans le SN [8].

La croissance prénatale est le plus souvent normale, cependant, environ un quart des nouveau-nés présentent une petite taille à la naissance. Chez le nouveau-né et le nourrisson, des difficultés d’alimentation (tétées faibles ou prolongées, reflux gastro-œsophagien) associées à des anomalies de la croissance pondérale (“failure to thrive ” des anglo-saxons) sont très fréquentes (environ 75 %) et peuvent nécessiter transitoirement la mise en place d’une alimentation par sonde nasogastrique. Ces difficultés s’améliorent généralement dans les premiers mois/années de vie, cependant, il persiste habituellement chez l’enfant plus âgé et l’adulte une certaine maigreur avec un indice de masse corporelle dans la moitié inférieure de la zone normale de la population générale. Le retard de croissance staturale, qui affecte 50 à 70 % des patients SN, devient souvent visible vers l’âge de 3–4 ans. Pendant l’enfance, la taille moyenne des enfants suit habituellement la limite inférieure de la zone normale de la population générale [−2 déviations standards (DS)]. Ce retard statural peut s’accentuer en période pubertaire du fait d’un retard pubertaire (et de l’absence d’accélération de la vitesse de croissance pubertaire par rapport aux autres enfants) fréquent dans les 2 sexes. Les tailles adultes, rapportées dans des études anciennes à partir de données recueillies chez un petit nombre de patients (une centaine) avec un diagnostic clinique de SN, seraient d’environ 162 cm chez les hommes et de 152 cm chez les femmes (correspondant à −2 DS par rapport à la population générale). Cependant, ces estimations de taille adulte doivent être considérées avec prudence et pourraient être plus élevées. En effet, l’âge osseux est souvent retardé de 1 à 2 ans dans le SN, ce qui est associé à une croissance prolongée jusqu’à l’âge de 18 ans.

Chez les filles, l’âge moyen des premières menstruations est de 14 ans. Bien qu’il existe peu de données publiées, la fertilité des femmes présentant un SN est habituellement considérée comme normale. Chez les garçons, une cryptorchidie est très fréquente (80 %). Certaines publications suggèrent que la fertilité des hommes pourrait être altérée en rapport avec une insuffisance testiculaire prédominant sur la lignée sertolienne (anomalie de la spermatogenèse avec oligo-azoospermie et hypogonadisme hypergonadotrope). Des dysthyroïdies peuvent être retrouvées notamment au moment de l’adolescence. Enfin, des études récentes suggèrent que le SN pourrait être associé à des perturbations métaboliques (intolérance au glucose, résistance à l’insuline). Des études prospectives, notamment chez l’adulte, sont nécessaires pour compléter toutes ces données.

Anomalies squelettiques

Les déformations du thorax (avec un aspect très évocateur de pectus carinatum supérieur et excavatum inférieur) et du rachis (notamment scoliose, 30 %) sont très fréquentes, notamment à l’adolescence. Des anomalies des membres (cubitus valgus , genu valgum ), une hyperlaxité ou au contraire une raideur articulaire (notamment au niveau des coudes) peuvent également être retrouvées.

Des études récentes suggèrent une diminution de la masse osseuse associée à une diminution de la masse et de la force musculaire chez ces patients.

Retard de développement et anomalies sensorielles

Bien qu'un retard des acquisitions psychomotrices et des difficultés d'apprentissage soient fréquentes chez les enfants SN, leur intelligence est le plus souvent normale.

L'hypotonie est fréquente chez le nourrisson, associée à un retard des acquisitions motrices (25 %, avec une tenue assise acquise en moyenne à 10 mois, une marche à 21 mois) et du langage (20 %). Par la suite, le quotient intellectuel (QI) est en moyenne de 85 avec des variations importantes entre les patients ; un retard mental (défini par un QI < 70) n'est retrouvé que chez environ 20 % des patients. Le plus souvent, les compétences intellectuelles sont préservées avec un QI de performance supérieur au QI verbal. La plupart des enfants suivent une scolarité normale mais certains présentent des retards des apprentissages (25 %) et/ou nécessitent une prise en charge éducative spécialisée (10–15 %). Des anomalies du comportement (déficit de l'attention, irritabilité, opposition) sont également fréquemment observées.

Une malformation d'Arnold-Chiari peut être retrouvée (< 5 %) et justifie la réalisation d'une IRM de la charnière cervico-occipitale en cas de retard mental et/ou de signes neurologiques (céphalées, convulsions).

Des anomalies neurosensorielles auditives (30 %, surdité de transmission secondaire à des otites, plus rarement surdité de perception) et visuelles (strabisme, amblyopie, troubles de la réfraction, 90 %) sont fréquentes et doivent être systématiquement recherchées.

Anomalies hématologiques et prédisposition tumorale

Un syndrome myéloprolifératif (défini par la présence d'une splénomégalie associée à une monocytose) est retrouvé chez 5,6 % des nourrissons SN avec mutation du gène PTPN11. Ces anomalies sont le plus souvent transitoires, cependant, 3 % d'entre-elles évolueront vers une leucémie myélomonocytaire juvénile aiguë (LMMJ) pour laquelle le seul traitement curatif possible est la greffe de moelle osseuse. Le pronostic des LMMJ aiguës est globalement sombre puisque 50 % des patients décèdent dans le premier mois de vie suite à l'infiltration monocytaire massive de l'ensemble des organes qui s'accompagne d'une défaillance multiviscérale.

Plus généralement, les patients SN ont un risque tumoral accru par rapport à la population générale avec un risque cumulé multiplié par 3,5 pour les patients avec mutation du gène PTPN11 [9] et multiplié par 8,1 tous génotypes confondus [10]. Le risque de cancer n'est pas connu chez l'adulte mais est considéré comme faible.

Enfin, des anomalies de la coagulation modérée (en lien principalement avec des anomalies de la fonction plaquettaire) sont souvent observées. Elles se manifestent principalement par des ecchymoses spontanées ou des saignements (épistaxis, métrorragies) ; des hémorragies plus sévères ont été décrites mais restent rares (3 %).

Génétique et corrélations phénotype-Génotype

Le SN est une maladie génétique autosomique (qui affecte aussi bien les hommes que les femmes) et dominante (risque de transmettre la maladie de 50 % pour les personnes atteintes) ; de rares cas de transmission récessive sont décrits (mutations du gène LZTR1).

Lorsque le diagnostic de SN est porté chez un enfant, le plus souvent, il s'agit d'une forme sporadique (mutation apparue de novo) mais il peut être également transmis par un des 2 parents (25 % des cas). Dans les formes de transmission familiale, il existe une prédominance de transmission maternelle (70 %) possiblement expliquée par une diminution de la fertilité masculine.

Bien que le diagnostic de SN soit principalement clinique, il doit toujours être confirmé sur le plan génétique. Le SN est génétiquement hétérogène et une anomalie génétique est identifiée chez plus de 80 % des patients. Le gène le plus fréquemment impliqué est le gène PTPN11 (environ 50 % des patients), et moins fréquemment les gènes SOS1 (10–15 %), RAF1 (5 %), RIT1 (5 %), KRAS (< 5 %) et plus rarement BRAFLZTR1MAP2K1 et NRAS (< 1 %). Tous ces gènes codent des constituants ou des régulateurs de la même voie de signalisation intracellulaire RAS/mitogen-activated protein kinases (MAPK) (Fig. 2). Actuellement, les analyses génétiques se font par l'approche des panels de gènes qui permettent l'étude des principaux gènes impliqués en une fois. Ces analyses sont longues et doivent être prescrites dans des centres spécialisés. L'identification du gène responsable de la maladie permet de confirmer le diagnostic et de compléter l'enquête familiale. De plus, la découverte des bases moléculaires dans le SN permet d'établir des corrélations phénotype-génotype. Ainsi, les patients porteurs d'une mutation du gène SOS1 présentent une forme moins sévère de la maladie. Au contraire, les patients porteurs d'une mutation du gène RAF1 sont plus à risque de développer un retard mental et une cardiomyopathie hypertrophique.

Fig 2

Fig 2

Tab II

Tab II

L’identification du gène responsable de la maladie permet de confirmer le diagnostic et de compléter l’enquête familiale. De plus, la découverte des bases moléculaires dans le SN permet d’établir des corrélations phénotype-génotype. Ainsi, les patients porteurs d’une mutation du gène SOS1 présentent une forme moins sévère de la maladie. Au contraire, les patients porteurs d’une mutation du gène RAF1 sont plus à risque de développer un retard mental et une cardiomyopathie hypertrophique.

Physiopathologie et possibilités de traitement : l'exemple du retard statural

La conséquence la mieux connue des mutations retrouvées dans les RASopathies est une activation excessive de la voie de signalisation RAS/MAPK qui est à l'origine des différentes atteintes observées. Nous prendrons l'exemple du retard statural.

Bien que des anomalies de la sécrétion de l'hormone de croissance (growth hormone, GH) aient été rapportées, le déficit en GH ne semble pas être la cause principale du retard statural dans le SN. Des études récentes suggèrent plutôt une insensibilité relative à GH (sécrétion de GH normale associée à des taux d'IGF1 bas) et/ou des anomalies de développement de la plaque de croissance (ossification endochondrale) chez ces patients. De manière intéressante, les données expérimentales suggèrent que ces deux types d'anomalies sont causées par une activation excessive de la voie RAS/MAPK. Ainsi, dans un modèle murin de SN, l'inhibition de cette voie de signalisation par des inhibiteurs spécifiques entraîne une augmentation des taux d'IGF1 et une correction des anomalies de développement de la plaque de croissance et par conséquent une correction du retard de croissance. D'autres études ont mis en évidence que le traitement de jeunes souris SN par des inhibiteurs pharmacologiques de la voie RAS/MAPK corrigeait également les anomalies crânio-faciales, la cardiopathie et le déficit cognitif.

Etant donné le rôle de l'activation de la voie RAS/MAPK dans la physiopathologie du SN, des stratégies thérapeutiques visant à réduire cette activation semblent très prometteuses. Ces inhibiteurs sont disponibles dans le traitement des cancers, cependant leur utilisation dans un contexte de maladie du développement soulève de nombreuses questions. Récemment des inhibiteurs de la 3-hydroxy-3-methylglutaryl coenzyme A réductase, également connus sous le nom de "statines'', ont été suggérés comme ayant un potentiel thérapeutique pour les RASopathies en diminuant l'activation de la voie Ras/MAPK. Un protocole hospitalier de recherche clinique (PHRC) national est actuellement en cours pour tester cette hypothèse.

Prise en charge

La prise en charge des patients présentant un SN est multidisciplinaire et doit être assurée tout au long de la vie, y compris à l’âge adulte. Habituellement, le suivi des enfants est réalisé annuellement dans des centres de référence/compétence disposant de l’ensemble des spécialités pédiatriques nécessaires à la prise en charge des différentes atteintes. Le suivi peut être espacé tous les 3 à 5 ans chez le patient adulte. Les recommandations de suivi des patients présentant un syndrome de Noonan sont décrites précisément dans le Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS), publié sur le site de la Haute Autorité de santé (HAS) en 20161et actuellement en cours d’actualisation. D’autres recommandations en langue anglaise sont également disponibles [12, 11].

Les principales recommandations de prise en charge chez les enfants présentant un SN sont résumées dans le Tableau II.

Par ailleurs, il est important de mettre en place un soutien psychologique de l’enfant et de sa famille au moment de l’annonce du diagnostic ou de l’apparition de complications sévères. Il existe une association pour le syndrome de Noonan2qui fournit de nombreux documents sur la maladie destinés aux familles et organise des réunions d’informations. Enfin, concernant l’intégration scolaire, des documents d’information destinés aux enseignants sont disponibles sur le site « Tous à l’école »3.

Conclusion

Le SN est aujourd'hui bien décrit sur le plan clinique et génétique chez l'enfant. Le devenir à l'âge adulte est moins bien connu et des études prospectives sont nécessaires. Actuellement, le traitement des différentes atteintes est symptomatique mais de nouveaux traitements sont en cours d'évaluation (modulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/ MAPK).

Déclaration de liens d'intérêts

Activités de consultant ou d'expertise sur le syndrome de Noonan pour le laboratoire Novonordisk (pas de rémunération directe mais honoraires versés sur le compte de l'unité INSERM U1301, Institut RESTORE, pour le financement de projets de recherche).

© 2021  Société Française de Pédiatrie (SFP). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Points essentiels

  • Le syndrome de Noonan (SN) est une maladie génétique rare (1/2000–2500 naissances) caractérisée par l’association de signes faciaux évocateurs, d’anomalies cardiaques (sténose des valves pulmonaires et/ou cardiomyopathie hypertrophique), d’un retard de taille, d’anomalies squelettiques (pectus , scoliose), d’un retard variable de développement et des apprentissages, et d’une prédisposition à certaines tumeurs.

  • Le diagnostic est principalement clinique mais doit toujours être confirmé sur le plan génétique (anomalie identifiée chez plus de 80 % des patients).

  • Le SN est génétiquement hétérogène et causé par des mutations de gènes codant des constituants ou des régulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/mitogen-activated protein kinases (MAPK).

  • Le rôle des pédiatres et des médecins de l’enfant est très important pour évoquer ce diagnostic le plus tôt possible, afin de permettre une prise en charge précoce.

  • La prise en charge est multidisciplinaire et doit être assurée tout au long de la vie, y compris à l’âge adulte.

  • Le devenir à l’âge adulte est moins bien connu et des études prospectives sont nécessaires.

  • Actuellement (en 2021), le traitement des différentes atteintes est symptomatique mais de nouveaux traitements sont en cours d’évaluation (modulateurs de la voie de signalisation intracellulaire RAS/MAPK).

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Références

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1 https://www.has-sante.fr/jcms/c_2679254/fr/rasopathies-syndromes-de-noonan-cardio-facio-cutane-et-apparentes.(S’ouvre dans une nouvelle fenêtre) 2 http://www.assonoonan.fr/(S’ouvre dans une nouvelle fenêtre) 3 http://www.tousalecole.fr/content/noonan-syndrome-de(S’ouvre dans une nouvelle fenêtre)