Endométriose superficielle
29 décembre 2021
Par Anne-Claire Nonnotte
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Endométriose superficielle
Stéphane Ploteau
Ploteau Stéphane , professeur des universités, praticien hospitalier, service de chirurgie gynécologique, hôpital femme-maternité, CHU de Nantes.
L’endométriose péritonéale est une entité à part dont la physiopathologie, l’histologie et l’évolution sont différentes des lésions d’endométrioses ovariennes et profondes [1] . L’endométriose superficielle peut être responsable de douleurs pelviennes et d’infertilité mais peut également être retrouvée chez des patientes asymptomatiques. La prévalence des patientes asymptomatiques atteintes d’endométriose superficielle n’est pas connue de façon claire mais des lésions d’endométriose typiques sont retrouvées chez 5 à 10 % des femmes asymptomatiques et plus de 50 % des femmes douloureuses et/ou infertiles. Le traitement laparoscopique des lésions d’endométriose superficielle est légitime en cas de douleurs pelviennes puisque l’on a montré que leur destruction diminuait de façon significative les douleurs par rapport à la laparoscopie diagnostique. Dans ce contexte, les techniques d’ablation et d’excision donnent des résultats équivalents en termes de diminution des douleurs [2,3] . Il est donc recommandé de traiter ces lésions quand elles sont découvertes lors d’une laparoscopie réalisée dans le cadre de douleurs abdominopelviennes, ceci réduit les douleurs à court et moyen terme. En revanche, il n’est pas recommandé de les traiter chez les patientes asymptomatiques [4] . Concernant le traitement des lésions superficielles chez les femmes infertiles, seules deux études méritent d’être retenues et toutes deux montrent que la laparoscopie opératoire avec excision ou ablation des lésions et adhésiolyse est supérieure à la laparoscopie diagnostique en termes d’augmentation du taux de grossesses [5,6] . Concernant le rôle des lésions asymptomatiques, il est difficile de conclure en une évolution potentiellement douloureuse chez ces patientes. L’endométriose superficielle est commune et sans signification clinique clairement identifiée. La possibilité qu’elles puissent évoluer vers des lésions symptomatiques est incertaine et il n’est probablement pas indiqué de les traiter d’autant plus que les risques inhérents à cette chirurgie ne sont pas nuls en fonction des localisations. Il n’est donc pas recommandé de traiter chirurgicalement une endométriose péritonéale superficielle asymptomatique surtout en cas de rapports intimes avec des éléments nobles (uretères, rectum et sigmoïde, ovaires chez une patiente nulligeste) car rien ne prouve qu’elle évoluera vers une maladie symptomatique [7] . L’expérience du chirurgien pour détecter ces lésions a permis d’améliorer de façon significative la prise en charge des patientes. Le diagnostic d’endométriose superficielle pendant la cœlioscopie est souvent porté sur des lésions typiques noires et bleues caractéristiques, mais il existe d’autres lésions plus subtiles d’endométriose péritonéale [8,9] . Ces lésions, fréquemment non pigmentées sont souvent diagnostiquées par biopsies.
L’endométriose a été confirmée dans 80 à 20 % des cas en présence d’opacités péritonéales blanchâtres, 81 % en cas de lésions rouges, dans 67 % des lésions glandulaires, 50 % en cas d’adhérences périovariennes, 47 % en cas de patch jaune brun et 45 % en cas de défects péritonéaux. Le plus souvent, en cas de lésions typiques, le diagnostic histologique confirme l’endométriose dans 64 à 93 % des cas. Les lésions d’endométriose péritonéales peuvent être classées en lésions noires, rouges et blanches [9] :
les lésions noires sont évidentes et sans ambiguïtés. Elles résultent d’une rétention de pigment d’hémosidérine donnant cette couleur caractéristique aux lésions. Sur le plan histologique, elles se composent de glandes endométriales et de stroma ( fig. 15.1 ) ;
les lésions rouges se présentent sous la forme de flammèches rouges, de lésions glandulaires, de zones pétéchiales ou d’adhérences périovariennes. Elles sont considérées comme les lésions les plus actives ( fig. 15.2 ) ;
les lésions blanches apparaissent sous forme d’opacifications blanchâtres du péritoine, de patchs jaune brun, de défects péritonéaux. Elles sont séquellaires.
Certains auteurs ont montré que des lésions d’endométriose non visibles pouvaient être retrouvées sur du péritoine d’apparence normale de femmes infertiles avec ou sans lésion d’endométriose visualisée. Plusieurs auteurs évoquent ce concept de lésion non visible [10-13] . Néanmoins, il est peu probable que ces lésions soient cliniquement symptomatiques.
Le traitement chirurgical des lésions péritonéales a trois principaux objectifs :
réduire la douleur ;
augmenter le potentiel de grossesse ;
éviter les récurrences.
Il peut être associé au traitement médical [7] .
Exérèse chirurgicale
Elle est réalisée à l’aide de ciseaux froids ou d’une autre énergie comme les ultrasons . La lésion est saisie avec une pince et l’ablation de la lésion et du péritoine est effectuée. Autant que possible, une attention particulière est portée à l’excision de toute la lésion et qu’une marge suffi sante est laissée entre la lésion et le péritoine sain. Avec cette technique, l’excision du péritoine est assez importante en taille. On peut noter que le risque d’adhérences induites par cette technique semble plus élevé qu’avec la technique de vaporisation [14] .
Électrocoagulation , vaporisation
Vaporisation au laser
Le laser CO 2 est en général utilisé. Ses propriétés sont l’absence de diffusion latérale de la chaleur et la très faible diffusion de la chaleur en profondeur. Cette technique de destruction des lésions est sûre et permet de contrôler au mieux la profondeur de pénétration du laser. La puissance requise est de l’ordre de 40-50 W et le mode continu est le plus souvent utilisé. En cas de lésion recouvrant des structures nobles comme les uretères, la vessie, le côlon ou les gros vaisseaux, l’hydrodissection peut être réalisée en infiltrant du sérum physiologique entre le péritoine et ces éléments nobles. Ceci permet d’assurer une vaporisation des lésions dans de bonnes conditions sans endommager ces éléments. Cette technique permet une destruction avec une précision de 100 à 200 μ m, ce qui est très précis et limite significativement la profondeur de pénétration. Cette technique est particulièrement adaptée aux lésions d’endométriose superficielle diaphragmatique.
Vaporisation à l’énergie plasma
Comme le laser CO 2 , les principales propriétés de l’énergie plasma sont l’absence de diffusion latérale de la chaleur, la très faible diffusion de la chaleur en profondeur et l’énergie cinétique. Le plasma utilise du gaz argon qui est insufflé à très faible débit (0,4 L/min). Les différentes propriétés de l’argon permettent d’utiliser cette énergie pour la chirurgie de l’endométriose superficielle mais également de l’endométriose profonde et des endométriomes. L’énergie plasma permet de réduire la diffusion de chaleur en profondeur, la perte du parenchyme ovarien sain et de traiter l’ensemble des lésions d’endométriose, conduisant à une amélioration des symptômes douloureux et des taux de grossesses postopératoires encourageants [15] . La vaporisation des lésions d’endométriose superficielle à une distance d’environ 5 mm de la pièce à main permet une ablation de celles-ci sous toutes leurs formes (rouges actives, bleutées et blanches cicatricielles) ( fig. 15.3 ). Comme le laser CO 2 , cette technique est particulièrement adaptée aux lésions d’endométriose superficielle diaphragmatique de moins de 1 cm et non transfixiantes. On utilise toujours la propriété ablative de l’énergie plasma en préservant le muscle diaphragme des perforations. Elle évite aussi les contractions incessantes des fibres musculaires car l’énergie plasma n’est pas une énergie électrique.
Coagulation
La technique de destruction par coagulation des lésions avec une pince bipolaire est possible, mais elle a deux inconvénients :
tout d’abord, le dommage thermique apparaît plus important qu’avec le laser CO2;
ensuite, la destruction des lésions péritonéales n’est pas toujours certaine et totale.
La récidive des lésions semble possible, voire plus fréquente [14]
Points clés
Le traitement chirurgical des lésions d’endométriose superficielle réduit les douleurs associées aux lésions d’endométriose superficielle. Les techniques d’ablation et d’excision péritonéale des lésions d’endométriose superficielle peuvent toutes deux être envisagées car d’efficacité identique.
En cas d’endométriose superficielle chez une patiente infertile, la cœlioscopie opératoire avec excision ou ablation des lésions avec adhésiolyse est supérieure à la cœlioscopie diagnostique en termes d’augmentation du taux de grossesse.
Il n’est pas recommandé de traiter chirurgicalement une endométriose péritonéale superficielle asymptomatique surtout en cas de rapports intimes avec des éléments nobles (uretères, rectum et sigmoïde, ovaires chez une patiente nulligeste) car rien ne prouve qu’elle évoluera vers une maladie symptomatique.
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Références
En savoir plus
[1] Nisolle M , Donnez J . Peritoneal endometriosis, ovarian endometriosis, and adenomyotic nodules of the rectovaginal septum are three diff erent entities . Fertil Steril 1997 ; 68 ( 4 ) : 585 - 96 . [2] Abbott J , Hawe J , Hunter D , et al. Laparoscopic excision of endometriosis: A randomized, placebo-controlled trial . Fertil Steril 2004 ; 82 ( 4 ) : 878 - 84 . [3] Sutton CJG , Ewen SP , Whitelaw N , et al. Prospective, randomized, double-blind, controlled trial of laser laparoscopy in the treatment of pelvic pain associated with minimal, mild, and moderate endometriosis . Fertil Steril 1994 ; 62 ( 4 ) : 696 - 700 . [4] Ploteau S , Merlot B , Roman H , et al. [Minimal and mild endometriosis: Impact of the laparoscopic surgery on pelvic pain and fertility. CNGOF-HAS Endometriosis Guidelines] . Gynecol Obstet Fertil Senol 2018 ; 46 ( 3 ) : 273 - 7 . [5] Marcoux S , Maheux R , Bérubé S . Laparoscopic Surgery in Infertile Women with Minimal or Mild Endometriosis . N Engl J Med 1997 ; 337 ( 4 ) : 217 - 22 . [6] Parazzini F . Ablation of lesions or no treatment in minimal-mild endometriosis in infertile women: a randomized trial. Gruppo Italiano per lo Studio dell’Endometriosi . Hum Reprod 1999 ; 14 ( 5 ) : 1332 - 4 . [7] Collinet P , Fritel X , Revel-Delhom C , et al. Management of endometriosis . J Gynecol Obstet Hum Reprod 2018 ; 47 ( 7 ) : 265 - 74 . [8] Jansen RPS , Russell P . Nonpigmented endometriosis: Clinical, laparoscopic, and pathologic defi nition . Am J Obstet Gynecol 1986 ; 155 ( 6 ) : 1154 - 9 . [9] Donnez J , Nisolle M , Casanas-Roux F . Peritoneal Endometriosis: Two-Dimensional and Th ree-Dimensional Evaluation of Typical and Subtle Lesions . Ann N Y Acad Sci 1994 ; 734 : 342 - 51 . [10] Nisolle M , Paindaveine B , Bourdon A , et al. Histologic study of peritoneal endometriosis in infertile women . Fertil Steril 1990 ; 53 ( 6 ) : 984 - 8 . [11] Walter AJ , Hentz JG , Magtibay PM , et al. Endometriosis: Correlation between histologic and visual fi ndings at laparoscopy . Am J Obstet Gynecol 2001 ; 184 ( 7 ) : 1407 - 13 . [12] Nezhat F , Allan CJ , Nezhat C , et al. Nonvisualized endometriosis at laparoscopy . Int J Fertil 1991 ; 36 ( 6 ) : 340 - 3 . [13] Redwine DB . ‘Invisible’ Microscopic Endometriosis: A Review . Gynecol Obstet Invest 2003 ; 55 ( 2 ) : 63 - 7 . [14] Donnez J . Atlas of operative laparoscopy and hysteroscopy . 3 rd ed. Abingdon : Informa Healthcare ; 2007 . [15] Bourdel N , Chauvet P , Roman H , et al. Comparison between resection, bipolar coagulation and Plasmajet®: A preliminary animal study . Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 2017 ; 211 : 127 - 33