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Angiopathie diabétique traité EMC Angéiologie

France | 28 novembre 2022

Par Monique Remillieux

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Angiopathie diabétique

1 juillet 2021 - Legrand, L.; Le Feuvre, C. Traité EMC Angéiologie, Volume 25, Numéro 1, Page 1-14

Résumé

Le diabète est un véritable problème de santé publique. Il s’agit d’un facteur de risque cardiovasculaire très répandu et dont la prévalence est en constante augmentation dans le monde. Les complications chroniques du diabète sont multiples et essentiellement en rapport avec une atteinte vasculaire. L’atteinte vasculaire du diabète concerne l’ensemble des vaisseaux de l’organisme quel que soit leur calibre. Sont décrites dans ce chapitre les atteintes vasculaires des vaisseaux de petits calibres vascularisant les reins, les yeux et même parfois les nerfs (microangiopathie), et les atteintes des vaisseaux de plus gros calibres dont les artères coronaires, les artères des membres inférieurs, des troncs supra-aortiques et l’aorte abdominale (macroangiopathie). La macroangiopathie intervient notamment dans la survenue des complications cardiovasculaires en aggravant l’athérome constitué. Le risque de développer une macroangiopathie augmente avec le degré d’hyperglycémie chronique. Le diabète augmente le risque de survenue de complications cardiovasculaire de 2 à 3 chez l’homme et de 4 à 5 chez la femme tous facteurs de risque confondus. La sévérité et la gravité des complications engendrées par le diabète ont fait l’objet de stratégies diagnostiques et de dépistage, mises en place par les autorités de santé. La fréquence de réalisation des examens et l’attitude thérapeutique à adopter pour la gestion de ces complications sont également précisées par des recommandations régulièrement mises à jour par les sociétés savantes. Il est important de souligner la nécessité d’éducation thérapeutique du patient et des professionnels de santé (médicaux et paramédicaux) qui vont intervenir dans sa prise en charge, qui est multidisciplinaire, et dont le médecin généraliste est le pivot.

Plan

Introduction

Épidémiologie et complications vasculaires du diabète

Le diabète est un facteur de risque cardiovasculaire bien connu et répandu. Dans le monde, la Fédération nationale du diabète estime que 387 millions de sujets sont atteints, soit une prévalence du diabète de 8,3 %. Dans les pays occidentaux, la prévalence du diabète est estimée à 3 % mais une évolution importante est prévue: le nombre de diabétique est passé de 3,5 % en 1990 à 8,3 % en 2012 et devrait passer à 500 millions d’ici à 2030. Une projection réalisée pour 2045 prévoit même une augmentation de 16 % du nombre de patients diabétiques avec une prévalence qui serait alors de plus de 10 %. Cette augmentation du nombre de diabétique de type 2 notamment est mise sur le compte de la modification du mode de vie.

Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité du patient diabétique. On estime en France à 6 % la proportion de décès directement imputables au diabète. La présence d’une hyperglycémie chronique multiplie par dix le risque cardiovasculaire chez les patients diabétique de type 2. La maladie coronaire est à elle seule responsable de 75 % des décès. L’association diabète et maladie coronaire amène le risque de mortalité à dix ans à 70 % chez ces patients. Dans les études autopsiques, il est relevé la présence d’une maladie coronaire sévère chez plus de 50 % des diabétiques âgés de moins de 75 ans et la prévalence est de 75 % chez ceux de plus de 75 ans.

Connaître les atteintes vasculaires du diabète pour mieux les dépister et les traiter est donc fondamental. La gestion de ces complications doit faire l’objet d’une prise en charge rigoureuse fondée sur les recommandations nationales et internationales.

Physiopathologie [1]

L’atteinte vasculaire liée au diabète concerne l’ensemble de vaisseaux de l’organisme quel que soit leur calibre. L’atteinte vasculaire prend différentes formes selon l’organe qu’elle atteint: on distingue les complications de microangiopathie qui vont atteindre les reins, les yeux et même parfois les nerfs et celles de macroangiopathie qui vont atteindre les artères coronaires mais aussi les artères de membres inférieurs, des troncs supra-aortiques et l’aorte abdominale. Quel que soit le vaisseau considéré, l’hyperglycémie liée au diabète fait qu’il y a un excès de glucose dans le sang et que celui-ci entre en abondance dans les cellules endothéliales, les cellules musculaires lisses, les péricytes et les cellules apparentées. La captation du glucose est dépendante du transporteur de glucose de type 1 (GLUT-1) qui n’est plus régulé par l’insuline, entraînant alors un excès de substrats énergétiques et un fonctionnement anormal des cellules, en particulier de la cellule endothéliale.

Du fait d’une augmentation du glucose circulant, il y a une augmentation du flux dans la voie de la glycolyse et des voies habituellement mineures sont débordées (voie du sorbitol, voie des hexosamines, activation de la protéine kinase C (PKC), synthèse de produits avancés de la glycation, modifiant irréversiblement les molécules, notamment les protéines par le glucose): leurs produits sont néfastes au fonctionnement de la cellule. Par ailleurs, ce flux dans la voie de la glycolyse aboutit à la mitochondrie dont les systèmes de protection, notamment les mécanismes antioxydants, sont débordés et deviennent insuffisants. Des espèces oxygénées réactives (ROS) sont alors générées et vont aléatoirement réagir avec telle ou telle molécule, la modifiant définitivement: c’est le stress oxydant lié à l’hyperglycémie. La cellule va être modifiée, ne pas assurer correctement sa fonction (dysfonction endothéliale, par exemple), voire disparaître. Pour le vaisseau: la paroi va s’épaissir et devenir anormalement perméable aux cellules et aux diverses protéines et lipoprotéines. Les conséquences ultérieures dépendent du vaisseau et du tissu dans lesquels elle se trouve. L’endothélium qui tapisse les parois vasculaires est impliqué de manière très importante dans les processus d’hémostase: il a une action pro-anticoagulante et une action anticoagulante mais il a aussi un rôle essentiel dans la régulation du passage des monocytes sanguins dans la paroi vasculaire. Ces monocytes vont jouer un rôle important dans la pathogenèse de l’athérosclérose. Dans des conditions normales, la couche endothéliale assume une fonction anticoagulante prédominante mais, en cas d’atteinte de l’endothélium, la contribution des facteurs menant à la thrombose prend le dessus. Une des caractéristiques de la dysfonction endothéliale est également une réduction de la biodisponibilité en monoxyde d’azote (NO) associée à la perte de ses propriétés antiathérogène et antithrombotique. La dysfonction endothéliale est ainsi impliquée de façon précoce dans la physiopathologie de l’athérosclérose. Il est connu que le pronostic du patient diabétique est lié à la gestion des complications de la maladie, notamment des complications vasculaires. Sont détaillées dans ce chapitre les différentes atteintes vasculaires que l’on peut retrouver chez les patients diabétiques et leur prise en charge diagnostique et thérapeutique.

Atteinte vasculaire du diabète

La microangiopathie correspond à une atteinte vasculaire touchant plutôt la microcirculation. Les principaux organes touchés sont le rein et la rétine. La macroangiopathie intervient dans la survenue des complications cardiovasculaires en potentialisant les facteurs de risque d’athérosclérose ou en aggravant l’athérome constitué (complications thrombotiques de l’athérosclérose mais aussi en accélérant le processus de vieillissement de la paroi artérielle). On parle de macroangiopathie pour décrire l’atteinte des artères musculaires allant de l’aorte jusqu’aux petites artères distales d’un diamètre supérieur à 200 μm. Le risque de macroangiopathie augmente avec le degré d’hyperglycémie chronique; ainsi chaque augmentation d’un point d’hémoglobine glyquée (HbA1c) correspond à une augmentation de 12 % du risque d’infarctus du myocarde (IDM).

La macroangiopathie est en schématisant une association de deux maladies artérielles distinctes: athérosclérose et artériosclérose caractérisée par une prolifération endothéliale et une dégénérescence de la média aboutissant à la médiacalcose. Ce mécanisme explique que la localisation de l’effet délétère du diabète sur les grosses artères ait un caractère particulier. Ainsi le diabète entraîne un risque relatif d’athérosclérose hiérarchisé: de 1 à 2 pour les accidents vasculaires cérébraux (AVC), de 2 à 4 pour l’insuffisance coronaire et de 5 à 10 pour l’artérite des membres inférieurs alors que l’hypertension artérielle (HTA) est un facteur de risque majeur pour les AVC et l’insuffisance coronaire, que l’hypercholestérolémie est responsable d’atteinte coronarienne et de lésions aortiques, que le tabac favorise l’insuffisance coronaire et l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI).

En tenant compte des autres facteurs de risque tels que HTA, dyslipidémie, tabagisme et âge, le diabète entraîne un risque relatif de survenue de complications cardiovasculaires de 2 à 3 chez l’homme et de 4 à 5 chez la femme. En matière d’athérosclérose, on sait que la femme diabétique perd son avantage naturel sur l’homme (sex-ratio hommes/femmes diabétiques entre 1 et 2 alors qu’il se situe dans la population non diabétique de moins de 50 ans entre 5 et 10).

Microangiopathie

Atteinte ophtalmologique: rétinopathie diabétique [2]

On estime qu’environ 30 % des diabétiques sont porteurs d’une rétinopathie, soit un million de patients en France. La rétinopathie diabétique est aussi fréquente au cours du diabète de type 1 qu’au cours du diabète de type 2. Elle n’est jamais présente chez le diabétique de type 1 au début de la maladie mais déjà présente chez 20 % des patients lors du diagnostic du diabète de type 2: cela est probablement dû aux plusieurs années d’hyperglycémie modérée ignorées au moment du diagnostic. La prévalence de la rétinopathie diabétique après 15 ans d’évolution du diabète est de 80 à 90 % chez le patient diabétique de type 1 et de 50 à 80 % chez le patient diabétique de type 2; celle-ci augmente avec la durée d’évolution du diabète et avec les difficultés de contrôle de l’hyperglycémie.

Le risque à long terme des diabétiques de type 2 est moins celui d’une rétinopathie proliférante que celui d’un œdème maculaire. En France, selon les données 2007–2010 de la cohorte « Échantillon national témoin représentatif des personnes diabétiques » (Entred), la fréquence de la rétinopathie diabétique était de 7,9 % en métropole d’après les registres médicaux. Cela a des conséquences importantes: 3,9 % des sujets diabétiques déclaraient avoir perdu la vue d’un œil et 16,6 % avaient reçu un traitement ophtalmologique par laser. La rétinopathie diabétique est la première cause de cécité chez les moins de 50 ans. Son évolution est insidieuse car les symptômes sont tardifs et marqués par une baisse d’acuité visuelle. Pour éviter une prise en charge tardive, une stratégie de dépistage chez le patient asymptomatique diabétique a été mise en place.

Physiopathologie

La rétinopathie diabétique est une atteinte du complexe neurovasculaire de la rétine: c’est une microangiopathie rétinienne précédée d’une atteinte neuronale rétinienne. Sa physiopathologie est complexe et multifactorielle. La souffrance endothéliale est à l’origine des lésions vasculaires avec en particulier un épaississement de la membrane basale des cellules, la perte des péricytes puis la perte des cellules endothéliales des capillaires rétiniens aboutissant à leur obstruction. À proximité des petits territoires de non perfusion capillaire, vont ensuite se développer des microanévrismes sur les capillaires de voisinage. La rétinopathie diabétique inclut également une dégénérescence rétinienne précoce pouvant précéder l’apparition des lésions vasculaires au fond d’œil (Fig. 1)

Figure 1 Arbre décisionnel. Mécanismes impliqués dans la pathogénie de la rétinopathie diabétique. VEGF: vascular endothelial growth factor; BHR: barrière hématorétinienne.

Figure 1

Figure 1

L’augmentation de la perméabilité capillaire menant à l’œdème rétinien et l’occlusion des capillaires menant à l’ischémie rétinienne sont responsables des premières lésions cliniquement visibles de la rétinopathie diabétique. Ces phénomènes occlusifs et œdémateux évoluent ensuite de façon concomitante. L’œdème prédominant dans la région centrale de la rétine (la macula) et les phénomènes occlusifs affectant surtout la rétine périphérique. L’augmentation de la perméabilité des capillaires au niveau de la macula est responsable d’un œdème maculaire qui va entraîner un épaississement de la rétine maculaire mesurable sur la tomographie en cohérence optique (OCT). La précipitation des lipoprotéines plasmatiques dans l’épaisseur de la rétine entraîne la formation d’exsudats lipidiques dans la macula. À noter que ce phénomène est accentué par la production en excès de vascular endothelial growth factor (VEGF) lorsque l’occlusion des capillaires est étendue: du fait de l’hypoxie, il y a une production de facteurs de croissance comme le VEGF par les cellules rétiniennes. Cela va induire une prolifération réactionnelle de néovaisseaux, on parle alors de rétinopathie diabétique proliférante.Diagnostic

La baisse d’acuité visuelle ne survient qu’après une longue période d’évolution silencieuse de la rétinopathie diabétique et est due aux complications néovasculaires ou à l’œdème maculaire. La rétinopathie diabétique doit être dépistée plus précocement avant la survenue de ces complications: les examens consistent en un examen microscopique du fond d’œil (FO) après dilatation pupillaire ou en une photographie du FO sans dilatation (rétinographe), avec analyse différée des photographies en centre de référence.Les lésions de la rétinopathie à identifier sont les microanévrismes, les hémorragies rétiniennes et les nodules cotonneux (non spécifiques de la rétinopathie diabétique) mais qui sont des petits foyers blancs d’infarctus de la rétine interne. En fonction de leur localisation, il faut également suspecter des poussées d’HTA associée (Fig. 2).

Figure 2 Illustrations de rétinopathie diabétique: présence de microanévrisme (petites lésions punctiformes rouges) (A) et hémorragies punctiformes au pôle postérieur. Microanévrismes visibles à l’angiographie à fluorescéine (B). Réseau capillaire dans la macula au cours d’une rétinopathie diabétique en angio-tomographie en cohérence optique (C), nombreux capillaires occlus par rapport au sujet sain (D).

Figure 2-A

Figure 2-A

Figure 2-B

Figure 2-B

Figure 2-C

Figure 2-C

Figure 2-D

Figure 2-D

On recherche également des signes évocateurs d’occlusion capillaire compliquant la rétinopathie diabétique dont  : les hémorragies rétiniennes « en taches » (Fig. 3), anomalies microvasculaires intrarétiennes (AMIR), traces de proliférations capillaires intrarétiniennnes autour d’un territoire où le capillaire était occlus, néovaisseaux prérétiniens et prépapillaires caractérisant la rétinopathie diabétique proliférante (Fig. 4) et des dilatations veineuses irrégulières en chapelet ou des boucles veineuses en bordure des larges territoires d’occlusion papillaire témoignant du phénomène d’ischémie.

Figure 3 Image de rétinopathie diabétique non proliférante sévère: hémorragies en taches sur toute la périphérie (à gauche).

Figure 3

Figure 3

Figure 4 Image de rétinopathie diabétique proliférante avec hémorragies prérétiniennes à droite.

Figure 4

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Des signes de gravité sont à rechercher: hémorragies intravitréennes, par saignements des néovaisseaux rétiniens ou prépapillaires, décollement de rétine dû à la traction exercée par le tissu fibreux de soutien des néovaisseaux ou encore une néovascularisation irienne pouvant provoquer un glaucome néovasculaire par blocage de l’écoulement de l’humeur aqueuse.

Concernant l’hyperperméabilité capillaire, on va rechercher des signes d’œdème maculaire: épaississement de la macula visible en OCT et des exsudats lipidiques témoignant de l’accumulation de lipoprotéines dans l’épaisseur de la rétine œdématiée (Fig. 5).

Figure 5 Image d’œdème maculaire associé à des exsudats lipidiques.

Figure 5

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Pour approfondir le diagnostic, différents examens complémentaires sont proposés:

  • l’angiographie à la fluorescéine: en complément du FO si nécessaire pour préciser le stade et l’évolutivité d’une rétinopathie au moment du diagnostic. Elle permet une visualisation des zones ischémiques et des problèmes de perméabilité vasculaires. Elle n’a pas d’indication tant que l’examen biomicroscopique du FO est normal. Elle est indispensable au traitement.

  • l’OCT est essentielle pour le diagnostic et le suivi de l’œdème maculaire. Elle permet d’identifier l’œdème maculaire et de mesurer son épaisseur.

  • l’échographie en mode B est utile en cas d’hémorragie du vitré dense qui va empêcher l’examen du FO: pour le diagnostic de décollement de rétine sous-jacent.

Dépistage et traitementDépistageD’après les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS):

  • un examen ophtalmologique tous les deux ans après un premier fond d’œil de référence chez le sujet diabétique non insulino-traité dont les objectifs de contrôle de la glycémie et de la pression artérielle (PA) sont atteints, est recommandé;

  • un examen annuel (après un premier FO de référence) en cas de diabète et/ou de PA mal contrôlée et chez les sujets traités par insuline;

  • chez la femme enceinte diabétique (hors diabète gestationnel), un examen avant la grossesse puis trimestriel pendant la grossesse puis en post-partum est recommandé;

  • il ne faut pas non plus oublier le dépistage des autres atteintes ophtalmologiques, en particulier la cataracte non spécifique mais plus fréquente et de survenue plus précoce chez le sujet diabétique. Une recherche de glaucome et de paralysies oculomotrices secondaires à une mononévrite diabétique doit être réalisée.

Traitement

Il a été montré que les principaux facteurs de risque de rétinopathie diabétique sont l’ancienneté du diabète, le mauvais équilibre glycémique et l’HTA. Le traitement repose sur:

  • le contrôle de la glycémie et de la PA: l’optimisation du contrôle glycémique (HbA1c < 7 %) et du contrôle de la PA (140/85 mmHg) permet de prévenir et de ralentir la progression de la rétinopathie diabétique;

  • la panphotocoagulation rétinienne (PPR): elle est réalisée en ambulatoire en plusieurs séances. C’est le traitement de la rétinopathie diabétique proliférante. Elle consiste à délivrer des impacts de laser de façon disséminée sur toute la rétine périphérique. Le but est d’obtenir une régression de la néovascularisation prérétinienne (90 % des cas). Le traitement par laser de l’œdème maculaire est plus difficile;

  • injections intraoculaires d’inhibiteurs du VEGF: dans les zones florides ou lorsque les saignements persistent, les traitements par injections intraoculaires d’inhibiteur du VEGF sont associés à une amélioration du pronostic visuel. Cela peut permettre également de réduire l’œdème maculaire et aussi de préparer la chirurgie qui consiste alors en une vitrectomie avec laser peropératoire.

Traitement chirurgical

Il est indiqué pour les rétinopathies diabétiques proliférantes compliquées d’hémorragie intravitréenne ou de décollement de rétine tractionnel.

En cas de rétinopathie diabétique avérée, le rythme de surveillance dépend du stade de la rétinopathie diabétique afin de mettre en route un traitement avant que ne survienne la baisse d’acuité visuelle irréversible.

Atteinte rénale: néphropathie diabétique [3]

Épidémiologie

Le diabète est la première cause d’insuffisance rénale terminale en Europe (12–30 %). Aux États-Unis, il représente plus de la moitié des cas d’insuffisance rénale. Cette prévalence est en augmentation ces dernières années du fait de l’augmentation de l’espérance de vie et de la prévalence du diabète de type 2: les patients diabétiques de type 2 représentent 75 % des patients dialysés. Cependant, tous les diabétiques ne sont pas concernés: à un niveau d’hyperglycémie comparable, 30 % des diabétiques de type 1 sont exposés à une insuffisance rénale pour des raisons génétiques également. En France, la néphropathie diabétique était, en 2011, la seconde cause de mise en dialyse. Les néphropathies liées au diabète de type 2 représentaient alors 19 % des cas de glomérulopathies primitives. La population des nouveaux patients dialysés en 2011 se caractérisait par une fréquence élevée de patients âgés avec un diabète associé. Enfin, les comorbidités cardiovasculaires étaient plus fréquentes chez les sujets dialysés ayant un diabète.

Physiopathologie

La maladie rénale diabétique comprend la néphropathie diabétique typique et d’autres formes d’atteintes rénales liées à l’athérosclérose de l’aorte et des artères rénales mais aussi à la néphro-angiosclérose et aux maladies tubulo-interstitielles (Tableau 1)

Tableau 1 Types d’atteinte rénale liée au diabète.

Mécanisme de l’atteinte rénale dans le diabète

Néphropathie diabétique classique

Rôle métabolique: hyperglycémie

Rôle hémodynamique

Stimulation système RAA Hyperfiltration glomérulaire

Rôle inflammatoire Passage par les stades classiques: hyperfiltration, augmentés en taille, microalbuminurie (A2), macroalbuminurie (A3) avant la baisse du DFG

Athérosclérose de l’aorte et des artères rénales avec sténose éventuelle, néphro-angiosclérose

Rôle des facteurs classiques d’athérosclérose Élévation des indices de résistances vasculaires intrarénales Baisse du DFG sans albuminurie ou avant l’apparition de celle-ci

Maladie tubo-intersticielles

Conséquences d’infections urinaires Toxicité médicamenteuse Hyperuricémie Baisse du DFG sans albuminurie mais avec marqueurs urinaires d’atteinte tubulaire (α1-microglobuline urinaire accrue)

DFG: débit de filtration glomérulaire; RAA: rénine angiotensine aldostérone.

En présence d’une hyperglycémie prolongée, le glucose interagit avec les groupements amines des protéines pour former des produits terminaux de glycation avancés: cela va altérer la fonction des protéines et leur faire acquérir des propriétés pro-inflammatoires. L’hyperglycémie s’accompagne également d’une vasodilatation rénale et d’une augmentation de la réabsorption sodée proximale par le biais des cotransporteurs sodium-glucose 1, 2 (SGLT1, SGLT2). Cela s’accompagne initialement d’une augmentation du débit de filtration glomérulaire (DFG). Cette hyperfiltration, associée à une augmentation de la pression capillaire glomérulaire et avec les dérivés glyqués induit des modifications morphologiques (prolifération mésangiale, expansion matricielle et épaississement de la membrane basale).

L’HTA et la protéinurie jouent également un rôle important dans la progression des atteintes rénales: elles sont associées à des anatomies structurales tardives (hyalinose artériolaire, puis aspect de glomérulosclérose nodulaire). L’autorégulation de la pression capillaire est alors perturbée induisant une hypertension intraglomérulaire. Le glomérule va alors laisser passer de plus en plus d’albumine, elle-même toxique pour les segments distaux du néphron. Les glomérules se sclérosent et la filtration glomérulaire, jusque-là élevée, s’abaisse. Lorsque l’excrétion urinaire d’albumine atteint des niveaux détectables par de simples bandelettes urinaires, on parle de macroalbuminurie ou protéinurie.

Diagnostic

La néphropathie diabétique est donc un syndrome clinique caractérisé chez le patient diabétique par une albuminurie (à la bandelette urinaire) supérieure à 300 mg/24 heures confirmée deux fois à trois mois d’intervalle associé à une baisse du DFG et souvent à une HTA.

Le diagnostic de néphropathie diabétique est histologique (Tableau 2). Cependant, la ponction-biopsie rénale (PBR) est rarement pratiquée. Le diagnostic de néphropathie diabétique est porté devant l’association d’une rétinopathie et d’une albuminurie augmentée de façon répétée (à partir du stade de macroalbuminurie). Avant, la néphropathie est dite « incipiens » ou silencieuse.

Tableau 2 Indications de la ponction-biopsie rénale.

Absence de rétinopathie associée Apparition précoce (< 10 ans après le diagnostic de diabète) de la néphropathie chez un diabétique de type 1 Évolution rapide vers l’aggravation, vers l’insuffisance rénale HTA sévère (rechercher une pathologie rénovasculaire) Protéinurie non sélective Présence d’œdèmes importants à un stade précoce Hématurie: il n’y en a pas dans la néphropathie diabétique

HTA: hypertension artérielle.

L’atteinte rénale des diabètes de types 1 et 2 diffère par quelques points. En particulier au moment du diagnostic du diabète de type 2, on ne connaît pas son ancienneté, et la grande majorité des patients ont déjà une HTA, une microalbuminurie, une protéinurie parfois et une insuffisance rénale. Dans le diabète de type 1, la néphropathie diabétique apparaît en moyenne 10–15 ans après le diagnostic mais la progression des complications rénales suit globalement la même course évolutive qu’au cours du diabète de type 1. Les lésions vasculaires rénales sont plus marquées donnant même parfois un tableau mixte. Chez le patient diabétique de type 2, l’atteinte rénale est plus hétérogène: un tiers des patients ont des lésions isolées caractéristiques de glomérulosclérose diabétique, un tiers ont des lésions de néphro-angiosclérose (lésions vasculaire prédominantes de type endartérite fibreuse) et un tiers n’ont pas d’atteinte diabétique mais une néphropathie d’une autre nature ou surajoutée aux lésions du diabète, ce qui va alors justifier la réalisation d’une PBR.

Le diagnostic de néphropathie incipiens est fondé sur les critères suivants:

  • microalbuminurie entre 30 et 300 mg/24 heures à plusieurs reprises en l’absence d’un déséquilibre aigu du diabète;

  • avec une PA normale.

Une rétinopathie sévère est souvent associée, mais son absence ne permet pas de récuser le diagnostic de néphropathie diabétique débutante. À noter que pour les diabétiques de type 2, la néphropathie incipiens à une double valeur: souffrance glomérulaire, mais aussi marqueur de risque cardiovasculaire à prendre en compte dans l’évaluation du risque cardiovasculaire global.

Différents stades évolutifs de la néphropathie diabétique sont représentés dans le Tableau 3.

Tableau 3 Stades évolutifs de la néphropathie diabétique.

1

Diagnostic

Hypertrophie (gros reins) Hyperfonction (hyperfiltration glomérulaire)

2

2–5 ans

Silencieux

3

5–10 ans

Néphropathie débutante: microalbuminurie (30 à 300 mg/24 heures) pression artérielle normale-haute

4

10–20 ans

Néphropathie avérée: protéinurie (albuminurie > 300 mg/24 heures) HTA chez 75 % des patients syndrome néphrotique dans 10 % des cas progression de l’insuffisance rénale

5

20 ans

Insuffisance rénale terminale: nécessité de dialyse et/ou de transplantation rénale (± pancréatique)

HTA: hypertension artérielle.

Dépistage et traitement

Dépistage

Il existe physiologiquement une très faible excrétion urinaire d’albumine détectable uniquement par radioimmunoassay ou immuno-éphélométrie. Son augmentation de plus de 30 mg/24 heures est appelée microalbuminurie et précède le stade de macroalbuminurie (> 300 mg/24 heures) détectable par des bandelettes urinaires. Dans le diabète de type 2, la microalbuminurie est prédictrice de néphropathie diabétique. Dans le diabète de type 2, la macroalbuminurie représente un facteur prédictif de mortalité cardiovasculaire. Le dépistage de la microalbuminurie se pratique par la mesure du rapport albumine/créatinine (A/C) sur un échantillon d’urine le matin. Un rapport A/C supérieur à 30 mg/g est en lien avec un risque très élevé de microalbuminurie (> 30 mg/j).

De façon initiale puis annuelle, il est recommandé:

  • de mesurer la PA;

  • de doser la créatinine plasmatique, estimation du DFG selon 

    modification of the diet in renal disease (MDRD) et chronic kidney disease epidemiology collaboration (CKD-EPI);

  • quantification de la microalbuminurie: chez tous les diabétiques de type 1 à partir de la cinquième année de diabète et chez tous les diabétiques de type 2.

Traitement

Prévention de la néphropathie diabétique

Trois facteurs aggravent la protéinurie et contribuent à la dégradation de la fonction rénale: l’hyperglycémie, l’HTA et le tabac.

Les préventions primaire et secondaire consistent en un contrôle glycémique optimal en optimisant les injections d’insuline ou par pompe, ce qui diminue le risque de néphropathie diabétique chez le diabétique de type 2. L’objectif recommandé est celui d’une HbA1c inférieure à 7 %, notamment en cas d’insuffisance rénale chronique (IRC) stade 3 et seulement inférieure à 8 % si IRC stade 4 ou 5. La cible d’HbA1c inférieure à 6,5 % est réservée aux patients chez qui le diabète vient d’être diagnostiqué sans complications. Il faut être attentif car l’HbA1c est souvent perturbée en cas d’IRC, en particulier faussement élevée en cas d’acidose, faussement diminuée en cas d’hémolyse et de carence martiale. Le sevrage tabagique diminue de 30 % le risque d’aggravation ou de survenue de microalbuminurie. L’instauration du traitement antihypertenseur, qui ralentit ou prévient la progression de la néphropathie chez le patient diabétique de type 2 hypertendu (notamment l’instauration d’un bloqueur du système rénine angiotensine) diminue le risque d’apparition d’une microalbuminurie. En l’absence d’albuminurie, la cible tensionnelle systolique est de 130 mmHg mais sans passer en dessous de 120 mmHg. Cette prescription doit tenir compte du risque d’hypotension orthostatique chez ces patients pouvant être porteurs d’une neuropathie diabétique et du risque d’hyperkaliémie (insuffisance rénale et acidose), c’est pourquoi le ionogramme sanguin est à surveiller.

Néphropathie débutante avérée

Chez les patients diabétiques, l’introduction d’un traitement bloqueur du système rénine angiotensine dès A/C supérieur à 30 mg/g de créatininurie est recommandée, même si le sujet est normotendu; les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA2) sont introduits en cas d’intolérance aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC). La cible tensionnelle est une PA systolique (PAS) inférieure à 130 mmHg dès que le rapport A/C de créatininurie est supérieur ou égal à 30 mg/g sous traitement par un bloqueur du système rénine angiotensine avec pour objectifs une réduction de l’albuminurie inférieure à 30 mg/g de créatininurie, ou une réduction de la protéinurie inférieure à 0,5 g/24 heures. Il est parfois nécessaire d’ajouter un traitement antihypertenseur, notamment un diurétique qui va potentialiser l’effet antihypertenseur et antiprotéinurique. Une restriction sodée modérée est également nécessaire. L’arrêt du tabagisme est impératif et le recours aux agents hypolipémiants.

Il faut penser à la recherche de sténose de l’artère rénale en cas d’HTA résistante et surveiller biologiquement la créatinine et la kaliémie.

Un recours aux spécialistes doit être envisagé; son intervention doit être précoce pour éliminer, entre autres, une autre néphropathie associée, préparer un traitement de suppléance et traiter de façon symptomatique l’insuffisance rénale

Insuffisance rénale terminale

La greffe rénale seule pour le patient diabétique de type 2 ou associée à une greffe du pancréas chez le patient diabétique de type 1 âgé de moins de 50 ans sans autres complications sévères peut être proposée aux patients. L’indication à l’épuration extrarénale (dialyse péritonéale, hémodialyse) est souvent plus précoce que chez les patients non diabétiques (DFG MDRD < 15 ml/min/1,73 m2).

Le pronostic de ces patients est lié aux complications cardiovasculaires, il faut anticiper ces complications en prédialyse ou prétransplantation.

Macroangiopathie

L’atteinte vasculaire concerne également les artères musculaires, de calibre supérieur à 200 microns. Elle est qualifiée de macroangiopathie et se distingue dans le diabète par sa précocité (athérosclérose accélérée), sa plus grande fréquence et sa sévérité (par exemple, les IDM sont plus souvent mortels). De plus, la paroi artérielle subit un vieillissement accéléré, avec calcification diffuse de la média (médiacalcose). À la radiographie standard, les artères sont alors visibles spontanément, en rail (Fig. 6).

Figure 6 Visualisation des artères coronaires « en rail » à la coronarographie d’un patient diabétique, la flèche orange désigne une médiacalcose de l’interventriculaire antérieure proximale.

Figure 6

Figure 6

Epidémiologie [2,3]

La maladie cardiovasculaire est le problème majeur des diabétiques de type 2: trois quarts d’entre eux mourront d’un problème cardiovasculaire, la moitié d’un IDM. Le diabète multiplie par 2 à 3 le risque de décès de cause cardiovasculaire, indépendamment des autres facteurs de risque fréquemment associés comme l’HTA. Chez la femme, il est multiplié par 4 à 5: le diabète réduit considérablement le bénéfice du genre féminin face au risque cardiovasculaire.

Dans l’étude CODIAB, une AOMI a été observée chez 19 % des personnes diabétiques. Selon les données de la cohorte ENTRED, 17 % des sujets diabétiques déclareraient un angor ou un antécédent d’IDM, 14 % un antécédent de revascularisation chirurgicale coronarienne.

Les médecins traitants ont rapporté que 6 % de leurs patients diabétiques avaient une insuffisance cardiaque et 5 % un AVC dans leurs antécédents. La mortalité des AVC et des IDM est supérieure dans le diabète (risque de décès multiplié par 2 environ).

Physiopathologie

Contrairement à la microangiopathie, dans la macroangiopathie, l’hyperglycémie intervient en potentialisant les autres facteurs de risque d’athérosclérose ou en aggravant l’athérome constitué (complications thrombotiques, accélération du vieillissement de la paroi artérielle). L’hyperglycémie entraîne une souffrance endothéliale liée à l’afflux de substrats glucidiques dans la cellule et au stress oxydant généré. Cependant, le risque de survenue d’une macroangiopathie augmente avec le degré d’hyperglycémie chronique. Ainsi, à chaque point supplémentaire d’HbA1c correspond environ une augmentation de 12 % du risque d’IDM. La macroangiopathie diabétique associe deux maladies artérielles distinctes: d’une part, l’athérosclérose qui semble histologiquement identique à l’athérosclérose du non-diabétique et, d’autre part, l’artériosclérose, caractérisée par une prolifération endothéliale et une dégénérescence de la média aboutissant à la médiacalcose. Ce second mécanisme explique probablement que la localisation de l’effet délétère du diabète sur les grosses artères soit particulière. Ainsi, alors que l’HTA est un facteur de risque majeur pour les AVC et l’insuffisance coronaire, que l’hypercholestérolémie est responsable principalement d’atteinte coronarienne et de lésions aortiques, et que le tabac favorise l’insuffisance coronaire et l’artérite des membres inférieurs, le diabète, lui, entraîne un risque relatif d’athérosclérose hiérarchisé: de 1,5 à 2 pour les AVC, de 2 à 4 pour l’insuffisance coronaire, de 5 à 10 pour l’artérite des membres inférieurs.

Évaluation du risque cardiovasculaire du patient diabétique asymptomatique

Chez le patient diabétique asymptomatique, une évaluation cardiovasculaire qui prend en compte la durée d’évolution du diabète, l’atteinte d’un autre organe cible et la présence d’autres facteurs de risque cardiovasculaire est importante à réaliser afin de cibler les examens de dépistage à prevoir. (Tableaux 4, 5) . Un moteur de calcul du risque spécifique du diabète de type 2 a été élaboré à partir de l’étude United Kingdom Prospective Diabetes Study (UKPDS). D’autres moteurs sont disponibles, comme le programme européen SCORE. Le risque obtenu est alors à multiplier par 2 à 4, puisqu’il ne tient pas compte de la présence du diabète.

Tableau 4 Évaluation du risque cardiovasculaire chez le patient diabétique .

Très haut risque cardiovasculaire

Patients présentant un diabète et une atteinte cardiovasculaire Ou une autre atteinte d’organe cible (protéinurie, EGFR < 30 ml: min/1,73m

2

, HVG ou rétinopathie) Ou ayant 3 facteurs de risque cardiovasculaire ou plus OU diabétique de type 1 évoluant depuis plus de 20 ans

Haut risque cardiovasculaire

Patients porteurs d’un diabète évoluant depuis ≥ 10 ans sans atteinte d’organe cible et ayant au moins un facteur de risque cardiovasculaire

Risque cardiovasculaire modéré

Patients jeunes (< 35 ans chez le diabétique de type 1 et < 50 ans chez le diabétique de type 2 avec une évolution du diabète de moins de 10 ans et sans autres facteurs de risque cardiovasculaire

EGFR: epidermal growth factor receptor ; HVG: hypertrophie ventriculaire gauche.

Tableau 5 Recommandations sur l’utilisation des prélèvements sanguins, de l’électrocardiogramme (ECG) et des tests fonctionnels pour établir un risque cardiovasculaire chez le patient diabétique asymptomatique .

Recommandations

Classe

Niveau

Dosage de microalbuminurie pour identifier les patients à risque de développer une insuffisance rénale ou un risque de maladie cardiovasculaire

I

B

Réalisation d’un ECG de repos si HTA associée ou suspicion de maladie cardiovasculaire

I

C

Réalisation d’un échodoppler artériel pour évaluer les lésions athéromateuses carotidiennes ou fémorales qui pourraient augmenter le risque cardiovasculaire

IIa

B

Réalisation d’un score calcique chez le patient diabétique asymptomatique à risque cardiovasculaire modéré

IIb

B

Réalisation d’un coro-scanner ou d’un test d’imagerie fonctionnel pour dépister la maladie coronaire

IIb

B

Mesure de l’indice de pression systolique à la cheville qui pourrait modifier l’évaluation du risque cardiovasculaire

IIb

B

Détection des plaques athéromateuses carotidiennes ou fémorales par scanner ou IRM chez les patients à risque cardiovasculaire modéré ou élevé

IIb

B

HTA: hypertension artérielle; IRM: imagerie par résonance magnétique.

Atteintes de la macroangiopathie

Coronaropathie

Ischémie myocardique: diagnostic clinique et examens complémentaires

L’atteinte des artères coronaires se manifeste classiquement par des douleurs thoraciques angineuses survenant à l’effort ou au repos, notamment dans le cas du syndrome coronarien aigu. L’ischémie est cependant souvent silencieuse chez le patient diabétique. En l’absence de plainte, il est recommandé un dépistage annuel des complications cardiologiques chez le patient diabétique. Une consultation de cardiologie annuelle associée à un électrocardiogramme (ECG) de repos est ainsi recommandée par la HAS . Néanmoins, chaque consultation du patient diabétique fait l’objet d’un interrogatoire à la recherche des signes fonctionnels évocateurs de complications cardiovasculaires que sont l’angor et la dyspnée. La prise de la PA à la recherche d’une HTA mais aussi d’une hypotension orthostatique (témoignant d’une neuropathie autonome) est également réalisée.

Le but de de la consultation de cardiologie et de la réalisation d’un ECG est d’évaluer la survenue d’une ischémie myocardique silencieuse (4 % des patients diabétiques) par la présence d’un trouble de repolarisation faisant suspecter une ischémie sous-endocardique ou sous-épicardique (Fig. 7 S’ouvre dans une nouvelle fenêtre). En fonction du risque cardiovasculaire (Tableau 4 S’ouvre dans une nouvelle fenêtre) une recherche de coronaropathie est réalisée, notamment par un test d’ischémie.

Figure 7 Arbre décisionnel. Proposition de prise en charge de la recherche d’ischémie chez le patient diabétique. ECG: électrocardiogramme; ESC: European Society of Cardiology; ECG: électrocardiogramme; SPECT: single photon emission computed tomography ; ETT: échocardiographie transthoracique; IRM: imagerie par résonance magnétique; TEP: tomographie par émission de positons; TDM: tomodensitométrie; FFR: fractional flow reserve ; VG: ventricule gauche.

a Atteintes des membres inférieurs ou des troncs supra-aortiques.

b Ischémie significative définie par: > 10 % du myocarde en SPECT, plus de 2 segments sur 16 en IRM, plus de 3 segments en ETT.

Figure 7

Figure 7

Les recommandations de l’European Society of Cardiology (ESC) 2019 vont plus loin et précisent les indications des différents examens complémentaires chez le patient asymptomatique (Tableau 5). Il est recommandé, en cas de lésions athéroscléreuses importantes (par exemple, score calcique > 400), de réaliser une imagerie fonctionnelle afin de mettre en évidence une éventuelle ischémie.

Chez le patient diabétique, on sait qu’un score calcique à 0 chez un patient asymptomatique est de pronostic très favorable. En revanche, il existe une augmentation du risque de mortalité relative de 25 à 33 % avec l’augmentation du score calcique (1-99/100-399/ > 400): un patient avec un score calcique supérieur à 400 verra son bilan complété par un coro-TDM ou une imagerie de stress. La sensibilité et la spécificité du test d’effort pour diagnostiquer une maladie coronarienne chez le patient diabétique sont respectivement de 47 et de 81 %. La sensibilité et la spécificité du test d’effort sont grandement améliorées par l’association à un examen d’imagerie: à ce jour, il n’y a pas d’étude démontrant de réels bénéfices du dépistage systématique de l’ischémie myocardique silencieuse en termes de mortalité ou de survenue d’IDM ou d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. C’est pour cela que les examens d’imagerie de stress ou la coro-TDM ne sont pas recommandés en systématique chez les patients diabétiques (classe IIb) (Tableau 5). En revanche, ils peuvent être réalisés chez une minorité de patients asymptomatiques, lorsqu’ils sont à très haut risque cardiovasculaire.

Les Tableaux 6, 7 résument les différents examens complémentaires disponibles en routine pour réaliser un test d’ischémie, leur fonction et leurs inconvénients. Le dépistage de la maladie coronaire est également recommandé chez ces patients diabétiques à haut risque lorsqu’ils souhaitent reprendre une activité physique intense (Société française de cardiologie/Association de langue française pour l’étude du diabète et des maladies métaboliques [SFC/ALFEDIAM]) et peut être réalisé en préopératoire d’une chirurgie extracardiaque chez ces patients.

Tableau 6 Fonction disponible pour chaque examen (HAS 2016).

Fonction

IRM de stress

Scintigraphie de stress

ETT de stress

Visualisation des artères coronaires

Non

Non

Non

Perfusion myocardique

Oui

Oui

Possible

Cinétique segmentaire myocardique

Oui

Oui

Oui

Viabilité myocardique

Oui

Oui

Oui

Mesure FEVG et volumes VG

Oui

Oui

Oui

IRM: imagerie par résonance magnétique; ETT: échocardiographie transthoracique; FEVG: fraction d’éjection ventriculaire gauche; VG: ventricule gauche.

Tableau 7 Fonction disponible pour chaque test d’imagerie (HAS 2016).

Techniques

Avantages

Inconvénients

Échocardiographie

Bonne accessibilité Non irradiant Faible coût

Nécessité d’injecter un produit de contraste dans certains cas Examen opérateur dépendant

Scintigraphie

Bonne accessibilité Obtention de données exhaustives

Examen irradiant

IRM cardiaque

Très bonne visualisation des tissus permettant une appréciation très précise de l’atteinte myocardique Examen non irradiant

Accès limité en cardiologie Analyse fonctionnelle limitée dans les arythmies Quantification de l’ischémie 3D limitée Coût élevé

IRM: imagerie par résonance magnétique.

Chez le diabétique, il n’y a pas d’étude montrant la supériorité d’un test d’imagerie de stress sur un autre pour dépister l’ischémie. Il n’a pas été retrouvé de différence significative dans la détection de l’ischémie entre scintigraphie d’effort au thallium et échographie dobutamine. Il est recommandé de privilégier les tests physiologiques, donc d’effort, si le patient en est capable. La capacité à l’effort (exprimée en Metabolic Equivalent of Task [MET]) présente une valeur pronostique chez ces patients avec une forte valeur prédictive négative sur le risque de survenue d’un IDM et la mortalité cardiovasculaire et doit apparaître dans le compte-rendu de l’examen. En cas de mauvaise échogénicité du patient, il faut préférer les examens radiologiques ou isotopiques à l’utilisation des ultrasons. L’échogénicité peut être améliorée par l’injection de contraste afin de mieux analyser l’endocarde. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) de stress sous dobutamine a une sensibilité identique à celle de l’échographie mais est peu utilisée du fait des modalités de réalisation. Le stress pharmacologique est plus fréquemment induit, comme en scintigraphie myocardique, par un vasodilatateur type dipyridamole (contre-indiqué en cas d’asthme). Ces examens pharmacologiques seuls peuvent être sources de faux négatifs en cas de lésions coronaires tritronculaires. La performance diagnostique de l’IRM de stress n’a pas été déterminée chez le patient diabétique spécifiquement mais elle présente l’avantage de pouvoir détecter la présence de fibrose. Il reste qu’elle n’est pas réalisable chez le patient claustrophobe (1–2 % des patients) ou chez le patient asthmatique (risque de bronchospasme sous adénosine) et doit être bien encadré chez le patient porteur de pacemaker. La réalisation de la coro-TDM, examen anatomique, n’est pas recommandé dans le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse.

Conséquences du diagnostic d’ischémie: indication de coronarographie?

La présence d’une ischémie n’entraîne pas forcément la réalisation d’une coronarographie. En effet, le résultat des tests fonctionnels et la surface de l’ischémie décelée permettent d’estimer de façon indirecte la sévérité des lésions coronaires, le risque de survenue d’événements et donc les patients chez qui la réalisation d’une coronarographie est préconisée. Il s’agit des patients à haut risque définis en fonction du test d’ischémie réalisé: respectivement plus de 10 % de surface d’ischémie pour la scintigraphie, dysfonction de deux segments sur 16 pour l’IRM et trois segments ou plus en échographie.

L’algorithme (Fig. 7) résume la gestion du dépistage de l’ischémie silencieuse chez les patients diabétiques dans le centre des auteurs.

Traitement

Prévention primaire

Chez le patient diabétique asymptomatique, la prévention primaire est primordiale et repose sur le contrôle de la glycémie et des autres facteurs de risque. L’ESC 2019 rappelle de façon synthétique les cibles thérapeutiques de chaque facteur de risque cardiovasculaire chez le patient diabétique (Tableau 8).

Tableau 8 Résumé des cibles thérapeutiques chez le patient diabétique.

Facteur de risque

Cible thérapeutique

HTA

Pression artérielle systolique < 130 mmHg (mais pas < 120 mmHg) SI âge > 65 ans: 130 > PAS cible < 139 mmHg PAD < 80 mmHg mais > 70 mmHg

Contrôle glycémique (HbA1c)

Pour la plupart des adultes HbA1c < 7 % HbA1c < 6,5 % chez certains patients en l’absence de risque d’hypoglycémie HbA1c < 8 % chez les patients plus âgés Les études récentes, ACCORD, ADVANCE et VADT, suggèrent qu’en dessous de 7 % d’HbA1c moyenne sur le long terme, le bénéfice est faible, cependant que le risque thérapeutique (hypoglycémies, iatrogénie) devient significatif

Dyslipidémie: LDLc

Patients à très haut risque cardiovasculaire: LDLc < 1,4 mmol/l (< 55 mg/dl) Patients à haut risque cardiovasculaire: LDLc < 1,8 mmol/l(< 70 mg/dl) Patients à risque cardiovasculaire modéré: LDLc < 2,5 mmol/l (< 100 mg/dl)

Tabagisme

Sevrage obligatoire

Activité physique

≥ 150 min par semaine en associant entraînement en aérobie et en résistance

Poids

Objectif de stabilisation du poids chez les patients en surpoids ou obèse diabétique de type 2 et de réduction pondérale chez les patients ayant une intolérance au glucose pour prévenir la survenue de diabète

Régime diététique

Réduire les apports caloriques chez les patients obèses diabétiques de type 2

HTA: hypertension artérielle; PAS: pression artérielle systolique; PAD: pression artérielle diastolique; HbA1c: hémoglobine glyquée; LDLc: low density lipoprotein-cholesterol.

Concernant l’utilisation d’un antiagrégant plaquettaire en systématique, il n’est pas indiqué en prévention primaire chez les patients diabétiques à risque cardiovasculaire modéré. Il ne peut être considéré (classe IIb) que chez le patient diabétique à très haut risque (aspirine à la dose de 75 ou 100 mg/j) en l’absence de contre-indication, sans oublier de joindre un inhibiteur de la pompe à proton (IPP) si nécessaire

Prévention secondaire

Le traitement antidiabétique chez le patient diabétique porteur d’une maladie coronaire symptomatique, outre la modification du mode de vie et les règles hygiénodiététiques associées à un contrôle strict des facteurs de risque, la prise en charge médicamenteuse est également modifiée:

  • les inhibiteurs du SGLT2 (empaglifozine, canaglifozine ou dapaglifozine) ont montré leur efficacité dans la réduction des événements cardiovasculaires chez les patients diabétiques de type 2 ayant une maladie cardiovasculaire authentifiée  ;

  • les agonistes du récepteur glucagon-like peptide-1 (GLP1) (liraglutide , semaglutide ou dulaglutide) ont montré également une efficacité dans la réduction de la mortalité de ces patients. Un bémol est à apporter concernant l’utilisation de la canaglifozine car l’étude CANVAS  a montré l’efficacité de la molécule dans la réduction des événements cardiovasculaires comme pour l’empaglifozine et le dapaglifozine mais, de façon significative, il existe aussi une augmentation du risque d’amputation restreinte sans que le mécanisme en soit connu. Cela limite sa prescription chez le patient à haut risque d’amputation et oblige le spécialiste à rester vigilant quant à la surveillance des extrémités de son patient.

Le traitement anti-ischémique de la maladie coronaire en prévention secondaire, l’aspirine à faible dose (75–160 mg), est formellement recommandé seul ou en association avec un autre inhibiteur du P2Y12 en fonction de la lésion coronaire et de son mode de revascularisation (Tableau 9).

Tableau 9 Recommandations thérapeutiques chez les patients diabétiques porteur d’une maladie coronaire aiguë ou chronique (prévention secondaire).

Recommandations

Classe

Niveau

Inhibiteur de l’enzyme de conversion ou ARA2 sont recommandés pour diminuer le risque cardiovasculaire

I

A

Les statines sont recommandées pour diminuer le risque cardiovasculaire

I

A

L’aspirine à faible dose est recommandée en prévention secondaire

I

A

Un traitement par inhibiteur du récepteur au P2Y12 par ticagrelor ou prasugrel est recommandé pendant un an au moins chez le patient diabétique ayant fait un syndrome coronarien aigu en association à l’aspirine. De même chez les patients ayant subi une angioplastie ou un pontage

I

A

Associer un inhibiteur de la pompe à proton chez le patient recevant une double antiagrégation plaquettaire ou un anticoagulant à faible dose en monothérapie à haut risque de saignement gastro-intestinal

I

A

Le clopidogrel est une alternative à l’aspirine pour le traitement antiplaquettaire

I

B

La prolongation de la double antiagrégation plaquettaire au-delà d’un an peut être envisagée pendant trois ans chez les patients ayant un faible risque hémorragique

IIa

A

Les bêtabloquants peuvent être envisagés chez ces patients

IIb

A

ARA2: antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2.

Les bêtabloquants ou, en cas d’intolérance, les inhibiteurs calciques ont une efficacité dans la réduction des angors d’effort et dans la diminution de la récidive d’événements ischémiques tout en améliorant la capacité d’exercice mais ils n’ont pas montré de modification significative du pronostic. En revanche, chez les patients ayant une dysfonction ventriculaire gauche (fraction d’éjection ventriculaire gauche [FEVG] < 40 %) en post-IDM, les bêtabloquants ont montré un intérêt pronostique. Dans ce cas, le carvédilol et le nébivolol sont préférés: ils améliorent la sensibilité à l’insuline sans effets négatifs sur la glycémie.

Revascularisation

Si le traitement médicamenteux est indispensable dans le traitement de la maladie coronaire du diabétique, il faut également envisager les différentes modalités de revascularisation, que celles-ci soient urgentes ou non. Les mêmes modalités de revascularisation sont à utiliser, que le patient soit diabétique ou non: en cas d’angioplastie, une approche par voie radiale avec implantation de stents actifs et l’utilisation de l’artère mammaire interne gauche pour le pontage aortocoronarien en priorité (grade IA). L’atteinte coronaire est cependant plus souvent diffuse et distale chez le patient diabétique, ce qui peut limiter la possibilité d’un geste de revascularisation. Avant la réalisation d’une angiographie, il faut rester vigilant à la fonction rénale du patient diabétique (grade IC), spécialement s’il est sous metformine, qui doit être arrêtée si la fonction rénale se détériore. Il faut retenir que le traitement médical optimal est à privilégier chez les patients diabétiques avec une maladie coronaire chronique. Une prise en charge plus invasive est à privilégier en cas de non-contrôle des symptômes, d’ischémie étendue ou d’atteinte d’un tronc commun ou de l’interventriculaire antérieure (IVA) (grade IIa). La décision collégiale en « heart team » reste primordiale mais, d’après les dernières recommandations de l’ESC, les indications de l’angioplastie sont larges chez les patients avec atteinte mono- ou bitronculaire, et chez les patients avec sténose du tronc commun de faible complexité anatomique (score SYNTAX inférieur à 22, c’est-à-dire avec une anatomie des lésions coronaires simple). Chez les patients ayant des lésions plus complexes, avec un score SYNTAX supérieur à 22, la prise en charge chirurgicale est plutôt recommandée (Tableau 10).

Tableau 10 Recommandations de l’European Society of Cardiology (ESC) 2019 sur les modalités de revascularisation coronaire chez le patient diabétique.

Pontage aortocoronarien

Angioplastie

Classe IIb

Maladie coronaire mono- ou bitronculaire

Sans atteinte proximale de l’IVA

Classe I

Classe I

Maladie mono- ou bitronculaire

Sans atteinte proximale de l’IVA

Maladie tritronculaire

Classe I

Complexité faible

(= score SYNTAX ≤ 22)

Classe IIb

Complexité intermédiaire

(= score SYNTAX [23;32])

Classe III

Haute complexité

(= score SYNTAX > 33)

Sténose du tronc commun

Classe I

Complexité faible

(= score SYNTAX ≤ 22)

Classe I

Complexité intermédiaire

(= score SYNTAX [23;32])

Classe IIa

Haute complexité

(= score SYNTAX > 33)

Classe III

IVA: artère interventriculaire antérieure.

Aorte et ses branchesArtères carotides

Que le patient soit diabétique ou non, la prise en charge d’une atteinte vasculaire carotidienne est identique.

Diagnostic clinique et examens complémentaires

Un mécanisme thromboembolique à partir des artères carotidiennes est en cause dans 10 à 15 % des AVC. Si les patients ayant présenté un AIT ou un AVC doivent bénéficier d’un examen des artères carotides par un Doppler rapidement, il n’est pas recommandé de réaliser un screening systématique des artères carotides chez le patient diabétique asymptomatique. À l’interrogatoire, on recherche des symptômes d’AIT mais l’examen physique va permettre également une auscultation des carotides à la recherche d’un souffle. L’échodoppler des carotides peut être compléter par une angio-IRM en cas de symptomatologie évocatrice d’AIT à l’interrogatoire et avant une revascularisation.

Dépistage et traitement

Pour les lésions asymptomatiques, de découverte fortuite, le traitement est conservateur. La revascularisation n’est envisagée qu’en cas de plaque à haut risque emboligène, en cas d’AVC ou d’AIT silencieux ipsilatéral ou de progression sténotique. Dans tous les cas, le traitement médical optimal est préconisé avec un contrôle impératif des facteurs de risque cardiovasculaire. Chez les patients ayant fait un AVC, la revascularisation doit être envisagée dès lors que la sténose est supérieure à 70 % ou supérieure à 50 % avec un risque de décès ou d’AVC peropératoire inférieur à 6 % (Fig. 8) .

Figure 8 Arbre décisionnel. Gestion de l’atteinte carotidienne extracrânienne. AVC: accident vasculaire cérébral; AIT: accident ischémique transitoire; TDM: tomodensitométrie; ARM: angiographie par résonance magnétique; TMO: traitement médical optimal; ATL + stent: angioplastie carotidienne avec stent; EAC: endartériectomie carotidienne.

a Haut risque d’EAC: âge > 80 ans, atteinte cardiaque cliniquement significative, maladie pulmonaire sévère, occlusion artère carotide controlatérale, antécédent de radiothérapie ou de chirurgie radicale du cou, resténose après endartériectomie.

Figure 8

Figure 8

Concernant les modalités de revascularisation, chez le patient diabétique, l’endartériectomie chirurgicale est la méthode de référence. L’angioplastie ne sera envisagée en cas d’impossibilité de réaliser une endartériectomie. Chez le patient diabétique, dans les deux cas, le risque de resténose est plus élevé quelle que soit la méthode utilisée.

Aorte abdominale

Diagnostic clinique et examens complémentaires

Le diagnostic clinique de l’anévrisme aortique abdominal (AAA) est souvent trop tardif et les manifestations cliniques peuvent alors être sévères (douleurs abdominales, rupture, dissection). Un dépistage par l’examen clinique cardiovasculaire est recommandé, que le patient soit diabétique ou non et sa prise en charge diagnostique et thérapeutique est identique (recommandations, ESC 2014). Il est recommandé un dépistage systématique de l’AAA par un examen ultrasons chez les hommes de plus de 65 ans. Des études ont montré que le taux de survenue d’anévrisme de l’aorte abdominale était moins élevé chez les patients diabétiques que chez les patients non diabétiques, sans que les raisons en soient connues [4].

Traitements et surveillance [9].

Les recommandations thérapeutiques concernant les AAA sont de plus en plus claires: une surveillance par ultrasons est recommandée tous les trois ans lorsque l’anévrisme mesure entre 3 et 3,9 cm de diamètre puis de façon annuelle, lorsque l’AAA est entre 4 et 4,9 cm puis tous les trois à six mois lorsque l’anévrisme est supérieur ou égal à 50 mm. En premier lieu, le traitement repose sur le sevrage tabagique et le respect des règles hygiénodiététiques. Aucune thérapeutique médicamenteuse n’a montré son efficacité dans le ralentissement de l’évolution d’AAA. En conséquence, aucun traitement n’est recommandé. Un contrôle de la PA et la mise sous mono-anti-agrégation plaquettaire associée à un traitement par statines doit être envisagée (classe IIaB). Le seuil d’intervention pour traiter un AAA chez l’homme est à 55 mm de diamètre. Mais chez la femme ayant un risque chirurgical acceptable, le seuil opératoire peut être abaissé à 50 mm. La progression de l’AAA supérieure à 1 cm/an doit amener le patient à consulter un chirurgien vasculaire. Si l’AAA devient symptomatique, le recours au chirurgien vasculaire est urgent.

Pour la plupart des patients avec anatomie appropriée et une espérance de vie satisfaisante, un traitement endovasculaire de l’AAA peut être envisagé comme traitement de première intention (classe IIA, niveau B).

Chez les patients ayant une espérance de vie longue, la chirurgie ouverte peut être envisagée comme traitement de 1re intention (classe IIA, niveau B).

Chez les patients ayant une espérance de vie retreinte, le traitement de l’AAA n’est pas recommandé (classe III, niveau B).

Artères des membres inférieurs

[4]Épidémiologie

L’AOMI concerne une atteinte de toutes les artères périphériques, à l’exception des artères coronaires et intracrâniennes. Il s’agit d’une complication fréquente du diabète et un tiers des patients hospitalisés pour AOMI ont un diabète. La prévalence de l’AOMI augmente avec la durée d’évolution de l’hyperglycémie et la présence des autres facteurs de risque cardiovasculaire. Chez le patient diabétique, l’AOMI affecte le plus souvent les artères sous le genou, ce qui complique les chances de revascularisation réussie. Le diagnostic est souvent tardif du fait d’une neuropathie diabétique associée qui diminue les sensations (perte de sensibilité du membre) et, de ce fait, retarde la prise en charge et augmente le risque d’infection. La prévalence de patients diabétiques chez les patients ayant une ischémie critique de membre est de 50 à 70 %.

Diagnostic clinique et examen complémentaire

Le diagnostic se fait par l’inspection soigneuse des pieds à la recherche de troubles trophiques: recherche des pouls, auscultation des trajets artériels à chaque consultation. L’interrogatoire recherche des signes de claudication intermittente. Puis il est pratiqué une mesure de l’indice de pression systolique (IPS) cheville/bras: c’est le rapport entre la PAS mesurée au bras et celle mesurée à la cheville (avec une sonde Doppler pour mesurer la pression occlusive, ou plus simplement avec un appareil de mesure automatique de la PA), chez un patient en décubitus; une valeur inférieure à 0,9 fait le diagnostic d’AOMI dans la population générale.

Dans la population générale, cette valeur est associée à une augmentation du risque de survenue d’événements cardiovasculaires et de décès. Une valeur supérieure à 0,9 est rassurante mais des valeurs supérieures à 1,1 évoquent une rigidité artérielle excessive aux membres inférieurs (médiacalcose) et ne permettent pas de conclure sur la présence ou non de sténoses.

Le Tableau 11 reprend les recommandations de diagnostic et de traitement pour la prise en charge de l’AOMI chez le patient diabétique.

Tableau 11 Recommandations pour le diagnostic et la gestion de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) chez les patients diabétiques (d’après [8]).

Recommandations

Classe

Niveau

Dépistage annuel de l’AOMI par examen clinique et/ou IPS

I

C

Éducation thérapeutique des patients diabétiques, particulièrement ceux qui ont de l’AOMI même asymptomatique sur les soins podologiques. La détection précoce des lésions cutanées est fondamentale pour améliorer le sauvetage du membre

I

C

Un IPS < 0,9 fait le diagnostic d’AOMI. En cas de symptômes, un Doppler doit être réalisé

I

C

SI IPS > 1,4, il faut pratiquer d’autres examens non invasifs comme un Doppler

I

C

Le Doppler est l’examen de première ligne pour évaluer l’état anatomique et hémodynamique des artères des membres inférieurs

I

C

IRM ou angio-TDM sont indiquées dans l’AOMI quand une revascularisation est envisagée

I

C

En cas de symptomatologie évocatrice de claudication intermittente avec un IPS normal, la réalisation d’un test à l’effort peut s’envisager

IIa

C

En cas d’ischémie critique chez un patient diabétique, avec des lésions en dessous du genou, la réalisation d’une angiographie devrait être envisagée avant la revascularisation

IIa

C

Une antiagrégation plaquettaire est recommandée chez le patient diabétique ayant une AOMI symptomatique

I

A

Chez le patient diabétique à très haut risque cardiovasculaire, porteur d’une AOMI, on recommande une cible de LDLc < 1,4 mmol/l (< 55 mg/dl) ou une réduction du LDLc d’au moins 50 %

I

B

En cas d’ischémie critique, il est recommandé d’évaluer le risque d’amputation en calculant le score Wifi par exemple

I

B

En cas d’ischémie critique, une revascularisation de sauvetage est recommandée dès lors que celle-ci est faisable

I

C

En cas d’ischémie critique, un contrôle optimal des glycémies est recommandé

IIa

C

Chez le patient diabétique porteur d’une AOMI chronique, sans surrisque hémorragique, une bithérapie par aspirine 100 mg p.o. et rivaroxaban 2,5 mg (deux fois par jour) devrait être envisagée

IIa

C

IPS: index de pression systolique; IRM: imagerie par résonance magnétique; TDM: tomodensitométrie; LDLc: low density lipoprotein-cholesterol ; p.o.: per os.

Chez un patient symptomatique, un échodoppler des membres inférieurs est à demander quand l’IPS est abaissé. Cet examen est effectué à partir de l’aorte abdominale (grade Ic).

Un IPS supérieur à 1,4 est en rapport avec un médiacalcose mais, dans 50 % des cas, le patient présente également une AOMI. Il est donc justifié de réaliser un échodoppler des membres inférieurs. Une angio-IRM ou artériographie ne sont demandées que si une revascularisation est envisagée, en cas d’échec du traitement médical.

Dépistage et traitement

Le contrôle glycémique et des autres facteurs de risque cardiovasculaire est, comme dans les autres angiopathies, indispensable et participe à la guérison.

Chez le patient diabétique présentant une AOMI symptomatique, la prescription d’une mono-antiagrégation plaquettaire est recommandée. Du fait du très haut risque cardiovasculaire, la cible du low density lipoprotein-cholesterol (LDL)-cholestérol (LDLc) chez ces patients est inférieure à 1,4 mmol/l, soit 55 mg/dl ou au moins une baisse de 50 % du LDLc. Chez les patients à faible risque hémorragique et présentant une AOMI symptomatique, une association thérapeutique composée de rivaroxaban à faible dose (2,5 mg deux fois par jour) à de l’aspirine peut être proposée (grade IIa).

En cas d’ischémie critique, une évaluation du risque d’amputation est à réaliser par le Wound, Ischemia and foot Infection classification (Wifiscore) qui tient compte de l’état cutané, du degré d’ischémie (IPS, pression partielle d’oxygène transcutanée [TcPO2]) de la présence d’une infection ou non. Une revascularisation de sauvetage doit être envisagée tant que le geste est réalisable (grade Ic).

La palpation d’un pouls pédieux n’élimine donc en rien l’existence d’une AOMI sévère des axes jambiers sous-jacents, mais il est sûrement un des meilleurs arguments pronostiques de l’artérite diabétique. En effet, cette persistance permet de réaliser des pontages distaux (utilisant la veine saphène interne dévalvulée in situ, ou inversée) dans le cadre d’un sauvetage de membre rendu nécessaire par une gangrène du pied. La gangrène, même limitée, n’est jamais secondaire à une microangiopathie diabétique; elle témoigne toujours d’une atteinte des artères musculaires, même s’il s’agit d’artères de petit calibre, et elle doit donc bénéficier, à chaque fois que cela est possible, d’une revascularisation. Un geste d’amputation a minima, réalisé sans exploration vasculaire risque de ne jamais cicatriser et d’entraîner une aggravation secondaire de l’ischémie avec un risque d’amputation majeure.

Conclusion

La prévalence du diabète est en augmentation dans le monde, notamment le diabète de type 2, en raison des modifications du mode de vie (alimentation, sédentarité). Des campagnes de prévention sur l’activité physique et les besoins nutritionnels sont lancées afin de participer à l’éducation des populations. En France, le Programme national nutrition santé (PNNS) est un plan de santé publique lancé dès 2001 visant à améliorer l’état de santé de la population en agissant sur l’un de ses déterminants majeurs: la nutrition. Les complications du diabète sont multiples et l’atteinte vasculaire est responsable d’une surmortalité chez ces patients. La gravité de ces complications, qui peuvent mettre en jeu son pronostic vital, justifie une prise en charge précoce et un dépistage régulier et systématique. Le Tableau 12 résume les modalités de surveillance des différentes complications du diabète d’après les recommandations de la HAS.

Points essentiels

  • Les complications chroniques du diabète de type 2 sont à la fois microvasculaires (rétinopathie, néphropathie et neuropathie) et macrovasculaires (IDM, artérite et AVC).

  • Leur survenue est fonction majoritairement du degré d’hyperglycémie, de la durée d’exposition à l’hyperglycémie (durée d’évolution du diabète) et du contrôle des autres facteurs de risque.

  • La surmortalité des personnes diabétiques par rapport aux non-diabétiques est multipliée par 2,2 pour les cardiopathies ischémiques, et par 1,8 pour les maladies cérébrovasculaires.

  • Les complications microangiopathiques associées au diabète sont à type de rétinopathie diabétique qui évolue en 15 à 20 ans vers une diminution de l’acuité visuelle, voire une cécité, et de néphropathie diabétique qui évolue vers une protéinurie persistante puis une insuffisance rénale au stade terminal. Le risque d’insuffisance rénale est d’autant plus élevé que le sujet diabétique est âgé ou qu’il a une HTA.

  • Chez le patient diabétique asymptomatique, une évaluation du risque cardiovasculaire global est fondamentale afin de cibler les examens de dépistage à prévoir.

  • L’évaluation du risque cardiovasculaire global tient compte de la durée d’évolution du diabète, de l’atteinte d’organes cibles et de la présence d’autres facteurs de risque cardiovasculaire.

  • L’ischémie est souvent silencieuse chez le patient diabétique: il est recommandé une consultation de cardiologie annuelle associée à un ECG de repos. Chez certains patients à très haut risque cardiovasculaire, peut se discuter un test non invasif de recherche d’atteinte coronaire.

  • Les recommandations ESC 2019 précisent les modifications thérapeutiques nécessaires chez le patient diabétique porteur d’une maladie coronaire: modifications du traitement antidiabétique, prolongation de la durée de la double antiagrégation plaquettaire en cas d’angioplastie et modalités de revascularisation coronarienne.

  • Les recommandations ESC 2019 font également le point sur le diagnostic et la prise en charge de l’AOMI chez le patient diabétique: en l’absence de surrisque hémorragique, une bithérapie par aspirine 100 mg et rivaroxaban 2,5 mg (deux fois par jour) devrait être envisagée.

  • La prévention primaire est primordiale chez le patient diabétique et repose sur le contrôle de la glycémie et des autres facteurs de risque cardiovasculaire.

Tableau 12 Recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) quant à la surveillance et la prise en charge des complications du diabète [10].

Cardiovasculaire

Ophtalmologique

Rénale

Objectif préventif de la surveillance

Risque cardiovasculaire global

Rétinopathie diabétique

Néphropathie diabétique

Signes fonctionnels

Angor Claudication intermittente AIT Dyspnée

Altération de l’acuité visuelle

Signes cliniques

Ischémie myocardique silencieuse, IDM AOMI AVC Insuffisance cardiaque

Décollement de rétine Microanévrisme Hémorragie rétinienne Exsudat liquidiens

Microalbuminurie Protéinurie persistante Insuffisance rénale

Examens

ECG de repos Palpation des pouls périphériques Auscultation cardiovasculaire et pulmonaire

Fond d’œil

Ratio albuminurie/créatinurie Créatinémie Débit de filtration glomérulaire

Rythme de répétition

À chaque examen (ECG: 1 fois/an)

Tous les 2 ans (1 fois/an si diabète ou HTA non équilibrés)

1 fois/an

AIT: accident ischémique transitoire; AOMI: artériopathie oblitérante des membres inférieurs; AVC: accident vasculaire cérébrale; ECG: électrocardiogramme; IDM: infarctus du myocarde; HTA: hypertension artérielle.

Déclaration de liens d’intérêts

les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

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Toute référence à cet article doit porter la mention : L. Legrand, C. Le Feuvre. Angiopathie diabétique. EMC - Angéiologie 2020;25(1):1-14 [Article 19-1515].

Références

  1. Collège des enseignants d’endocrinologie, diabète et maladies métaboliques (CEEDMM). Item 233 C: Complications dégénératives et métaboliques du diabète. Université Médicale Virtuelle Francophone. 2010-2011. http://campus.cerimes.fr/endocrinologie/enseignement/item233c/site/html/cours.pdf S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.

  2. Collège des ophtalmologistes universitaires de France. http://couf.fr S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.

  3. HAS. Prévention et dépistage du diabète de type 2 et des maladies liées au diabète. 2014.

  4. Cosentino F., Grant P.J., Aboyans V., Bailey C.J., Ceriello A., Delgado V., et al.: 2019 ESC Guidelines on diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases developed in coll aboration with the EASD: The Task Force for diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases of the European Society of Cardiology (ESC) and the European Association for the Study of Diabetes (EASD). Eur Heart J 2020; 41: pp. 255-323.

  5. Zinman B., Wanner C., Lachin J.M., Fitchett D., Bluhmki E., Hantel S., et al.: Empagliflozin, cardiovascular outcomes, and mortality in type 2 diabetes. N Engl J Med 2015; 373: pp. 2117-2128.

  6. Marso S.P., Daniels G.H., Brown-Frandsen K., Kristensen P., Mann J.F., Nauck M.A., et al.: Liraglutide and cardiovascular outcomes in type 2 diabetes. N Engl J Med 2016; 375: pp. 311-322.

  7. Neal B., Perkovic V., Mahaffey K.W., de Zeeuw D., Fulcher G., Erondu N., et al.: Canagliflozin and cardiovascular and renal events in type 2 diabetes. N Engl J Med 2017; 377: pp. 644-657.

  8. Aboyans V., Ricco J.B., Bartelink M.E.L., Björck M., Brodmann M., Cohnert T., et al.: 2017 ESC Guidelines on the Diagnosis and Treatment of Peripheral Arterial Diseases, in coll aboration with the European Society for Vascular Surgery (ESVS): document covering atherosclerotic disease of extracranial carotid and vertebral, mesenteric, renal, upper and lower extremity arteries Endorsed by: the European Stroke Organization (ESO) The Task Force for the Diagnosis and Treatment of Peripheral Arterial Diseases of the European Society of Cardiology (ESC) and of the European Society for Vascular Surgery (ESVS). Eur Heart J 2018; 39: pp. 763-816.

  9. Wanhainen A., Verzini F., Van Herzeele I., Allaire E., Bown M., Cohnert T., et al.: European Society for Vascular Surgery (ESVS) 2019 Clinical Practice Guidelines on the Management of Abdominal Aorto-iliac Artery Aneurysms. Eur J Vasc Endovasc Surg 2019; 57: pp. 8-93.

  10. Item 245. Néphropathies diabétiques Collège universitaire des enseignants de néphrologie